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jeudi 2 novembre 2023

Marion Maréchal en Arménie : « J’ai été frappée par leur regard vide »

 


Arrivée samedi 28 octobre en Arménie, Marion Maréchal a passé plusieurs jours auprès des responsables et des populations touchées par la guerre. Visiblement émue, elle dit à BV le contexte, les échanges et les rencontres qui l'ont le plus marquée lors de ce voyage.

Marc Baudriller. La France semble relativement indifférente au sort de l’Arménie, contrairement à celui de l’Ukraine et d'Israël. Comment l’expliquez-vous ?

Marion Maréchal. Il y a plusieurs explications. La première est que Ursula von der Leyen [présidente de la Commission européenne, NDLR] a doublé l’importation de gaz azéri pour pallier la rupture de liens énergétiques avec la Russie. Une partie de ce gaz venu d’Azerbaïdjan est en réalité du gaz russe transitant par l’Azerbaïdjan. Deuxièmement, il y a une crainte à l’égard de la Turquie qui est un soutien de l’Azerbaïdjan dans le cadre de ce conflit de l’Artsakh. Aujourd’hui, comme depuis des années, la Turquie fait un chantage à l’immigration : elle menace d’ouvrir très grand ses frontières et de laisser se déverser potentiellement des millions de personnes. Par ailleurs, il y a aussi un affaiblissement de la voix de la France au sein même de l’Union européenne. Enfin, on connaît les relations privilégiées de l’Allemagne avec la Turquie, en raison de la très grande communauté turque en Allemagne. Et puis, dans le cadre du conflit russo-ukrainien, les tensions avec la partie russe rejaillissent dans ce conflit, car en l’occurrence, les Russes ont longtemps été les alliés des Arméniens face aux menaces de l’Azerbaïdjan. Toutes ces contingences entraînent le silence et l’absence de condamnation.

M. B. Si vous étiez au pouvoir, que demanderiez-vous à l’Azerbaïdjan et à la Turquie ?

M. M. Il faudrait une condamnation de la part de l’Union européenne et de la France à l’égard de l’Azerbaïdjan et de la Turquie. Il n’y en a pas eu. Il y a eu, plutôt, des marques d’amitié et de relations courtoises. Il faudrait demander une sanction pour l’Azerbaïdjan, comme ce fut le cas pour la Russie, en raison d’une violation du droit international. L’Azerbaïdjan a commis des crimes de guerre, une épuration ethnique, cela mériterait a minima une suspension du Conseil de l’Europe et un certain nombre de mesures, y compris économiques.
En ce qui concerne la Turquie, au regard des dernières déclarations extrêmement agressives d’Erdoğan à l’égard de l’Europe - il semble vouloir fédérer tous les pays soutenant le Hamas et superviser ce fameux conflit de civilisation entre ce qu’il appelle « la croix et le croissant » -, il faut définitivement mettre fin au processus de pré-adhésion qui a coûté, jusqu’ici, plus de 15 milliards d’euros aux contribuables européens.
Il faudrait également poser sur la table le débat de l’appartenance de la Turquie à l’organisation militaire de l’OTAN qui est censée garantir la sécurité de l’Europe. La France ne devrait pas remettre intégralement sa sécurité et son indépendance, en matière diplomatique et de défense, à cette organisation. Elle devrait prendre la trajectoire d’une indépendance maximale, sur les plans diplomatique, militaire et opérationnel.

M.B. Quels sont les témoignages qui vous ont le plus touchée parmi les Arméniens que vous avez rencontrés ?

M. M. Nous avons vu plusieurs familles de réfugiés, ainsi que des élus qui ont assuré leur accueil et leur insertion. J’ai le souvenir de cette étudiante qui était restée côté arménien et qui a retrouvé ses parents et ses petits frères. Eux avaient quitté le territoire de l’Artsakh à la fin de l’épuration ethnique. Ses parents étaient en état de sous-nutrition, comme beaucoup de réfugiés, en raison du blocus des aliments et des médicaments. J’ai rencontré un couple d’agriculteurs qui nous racontait être obligé de consommer la nourriture pour les animaux pour se nourrir. Ils ne pouvaient pas, non plus, se chauffer en raison des coupures de gaz et d’électricité. J’ai également été frappée par un témoignage particulièrement bouleversant d’une vieille femme avec ses enfants. Elle avait vu la grande croix de son village abattue par les Azéris. Elle en a pleuré, elle éprouvait beaucoup de difficulté à laisser derrière le monument aux morts de son village qui serait profané. Elle était bouleversée.
Un autre témoignage atroce : des parents, dont les deux petits garçons de huit et dix ans ont été décapités, ont dû repartir avec les corps dans la voiture durant l’exode car ils ne pouvaient plus accéder au cimetière et avaient peur des profanation qui allaient suivre.
J’ai été très frappée par leur regard vide, comme si une partie d’eux-mêmes était restée là-bas. Ils ne se plaignent pas des conditions matérielles mais du fait que, pour la première fois, il n’y aura plus d’Arméniens et de chrétienté sur cette terre de l’Artsakh à cause des profanations de cimetières, des destruction d’églises, de la conversion des églises en mosquées et de la destruction de tout symbole religieux. Pour les Arméniens, c’est très bouleversant.

M. B. Que disent ces Arméniens à la France ?

M. M. Ils conservent une grande affection pour la France, bien que la France n’ait pas été très audible dans ce dossier. Ils sont reconnaissants pour l’aide humanitaire et le partenariat militaire. Ils ont cependant un sentiment d’abandon. Ils nous disent : « Vous avez été présents pour l’Ukraine, soyez là pour nous ! »
Ils éprouvent une grande inquiétude pour l’avenir. Le conflit n’est pas fini. La réalité, c’est que l’Azerbaïdjan, poussé par la Turquie, commence déjà à grignoter des territoires arméniens montagneux. L’ensemble de l’Arménie est menacée.
Par ailleurs, au-delà de ce conflit, on voit se superposer un conflit de civilisation. On le voit dans la rhétorique islamique de la Turquie. Les Arméniens nous disent : « Attention, ce qui nous arrive aujourd’hui pourrait vous arriver demain, donc ne nous oubliez pas ! »

Entretien réalisé au téléphone le 31 octobre 2023

Par Marc Baudriller le 1er novembre 2023

Boulevard Voltaire

dimanche 29 octobre 2023

Le 3 avril 1987... Il y a mille ans



La liberté d’expression est morte depuis qu’elle est devenue, pour les tenants du gauchisme culturel, la liberté d’interdire d’expression quiconque ne pense pas comme eux. On ne compte plus les atteintes à cette liberté : interdiction à tel ou tel de donner une conférence, défense de réunir ses lecteurs dans une salle publique, une bibliothèque, une librairie, à l’École normale supérieure, à Science Po, dans des universités.

Le service public, payé par le contribuable, propose des plateaux et des tables rondes où débattent blancs bonnets et bonnets blancs. Les contradicteurs sont des faire-valoir. Questions perfides aux Rebelles, ronds de jambe de connivence pour les Soumis, proscriptions des Résistants. Ceux qui en appellent à la liberté d’expression l’interdisent au nom de la liberté d’expression. À Bordeaux, on interdit Sylviane Agacinski qui s’élève contre la traite négrière moderne qu’est la vente d’enfants ; et on invite Judith Butler qui œuvre à la marchandisation des corps et on lui décerne le titre de docteur honoris causa à l’Université de... Bordeaux. On interdit Alain Finkielkraut à Science Po Paris ; et on sollicite Houria Bouteldja, racialiste, antisioniste et décolonialiste à l’Université de Limoges. On détruit quatre cent cinquante livres de François Hollande à l’Université de Lille ; et on déroule le tapis rouge de l’Université de... Bordeaux à Jean-Marc Rouillan, d’Action directe, bien qu’il ait tué deux personnes et fait l’apologie du terrorisme en 2015 – bien que, ou peut-être plutôt parce que.

J’ai souvenir, pour ma part, qu’une pétition lancée par les freudolâtres, Élisabeth Roudinesco en tête, avait été envoyée à France Culture pour interdire la diffusion de mon séminaire de l’Université populaire de Caen consacré à Freud. Cette demande de censure avait été effectuée « au nom de la liberté d’expression » ! Le directeur de l’époque, Olivier Poivre d’Arvor, n’y a pas consenti, qu’il en soit ici remercié. La besogne fut exécutée il y a six ans par Sandrine Treiner. Je suis toujours interdit de service public, y compris dans cette maison qui affiche sans rire un slogan à se tordre : « France Culture, l’esprit d’ouverture ». C’est probablement au nom de l’esprit d’ouverture qu’ils décrètent tant de fermetures !

L’impossible débat

Le débat démocratique n’existe plus. Quant, à Front populaire, nous avons organisé une rencontre avec Éric Zemmour, qui n’était pas encore candidat, devant quatre mille personnes au palais des Congrès de Paris, L’Obs a fait paraître un article expliquant ce que cette rencontre avait donné... une heure avant qu’elle ait eu lieu ! Incestueuse, la presse maëstrichienne a ensuite fait savoir que j’étais aligné sur lui.

Quelque temps plus tard, l’Agence France Presse annonça que « j’envisageais de voter Zemmour » en oubliant que j’avais ajouté une condition : « S’il muscle son bras gauche ! » Il ne l’a pas musclé, c’est le moins qu’on puisse dire, il n’y eut donc pas de compagnonnage. Mais débattre avait suffi pour anathématiser. Peu importe que j’aie fait savoir partout que je souscrivais à son diagnostic d’une France qui allait mal, mais pas à ses solutions ; il croit à l’homme providentiel, moi au peuple providentiel ; rien n’y a fait. Nous avions débattu, nous nous sommes parlé, nous avons ferraillé et bataillé sans nous insulter, mais j’étais un allié du diable du simple fait d’avoir échangé avec lui !

Il est loin le temps béni où l’excellent Bernard Pivot pouvait inviter sur le plateau d’Apostrophes Maurice Bardèche, fasciste revendiqué, et Bernard-Henri Lévy, sans que la presse du gauchisme culturel ne titre le lendemain que BHL souscrivait à ses thèses antisémites. Il y avait aussi, sur ce plateau, un certain Gabriel Matzneff. Quelle était la thématique ? La responsabilité des intellectuels. Bardèche, l’un des inventeurs du négationnisme, y défendait un livre sur Céline, et BHL son Éloge des intellectuels. Personne n’a estimé que, par capillarité, Bernard-Henri Lévy soit devenu négationniste, ni même que Bardèche fût converti aux idéaux de BHL. Il y avait juste eu débat. C’était le 3 avril 1987, il y a mille ans.

Ces débats ne sont plus parce que la gauche culturelle voit son pouvoir menacé par une presse et des médias vraiment libres qui n’appartiennent ni à l’État ni à des milliardaires alignés sur son idéologie nihiliste.

De Gaulle avait, après-guerre, donné la culture, l’éducation, la recherche, l’université à la gauche avec laquelle il gouvernait – difficile de confier l’Intérieur, les Affaires étrangères, l’Armée aux communistes qui prenaient leurs ordres à Moscou...

Mai 68 a généré une gauche soixantaine-huitarde qui s’en est donnée à cœur joie en se recasant chez Mitterrand, grand recycleur de trotskistes. Ceux-là ont détruit ce qu’ils ont touché. On commence à le dire, ça commence à se voir, à se savoir : ils défendent leur peau de chagrin idéologique comme des satrapes le dos au mur. 

Quand ils entendent une voix qui ne vient pas de leur meute, ils sortent leur revolver.

Par Michel Onfray le 29 octobre 2023

Le JDD


vendredi 20 octobre 2023

L’Albanie dans l’UE ? « Macron tient une position irresponsable »



Le président de la République vient de passer deux jours à Tirana, la capitale albanaise, les lundi 17 et mardi 18 octobre, dans le cadre du 9e sommet du processus de Berlin où se rassemblent les dirigeants des pays des Balkans. À l’issue de cette rencontre, il a ouvert grand les bras de l’Europe à l’Albanie, pays réputé très corrompu de trois millions d’habitants à 60 % musulmans et à 16 % chrétiens. Cette ouverture provoque la colère et l’opposition de Nicolas Bay, député européen, président de groupe au conseil régional de Normandie et vice-président exécutif de Reconquête, qui s’exprime au micro de BV.

Marc Baudriller. Dans le cadre de ce sommet, Emmanuel Macron a été très clair : « L’avenir de l’Albanie est pleinement européen, a-t-il dit, c’est l’intérêt des Albanais tout comme celui de notre union. Car une Europe puissante dans un monde de rivalités est une Europe qui rassemble le plus grand nombre autour de valeurs et d’un projet commun. » Êtes-vous en accord avec cette affirmation présidentielle ?

Nicolas Bay. Macron exprime ce que le gouvernement albanais a envie d’entendre, c’est-à-dire que leur pays a vocation à intégrer l’Union européenne (UE). C’est à la fois extrêmement injurieux pour les pays voisins - je pense à la province serbe du Kosovo et aux Serbes envahis par l’Albanie depuis des années et à d’autres pays voisins comme la Macédoine. La Macédoine est passée sous le contrôle de l’Albanie. C’est donc très insultant pour ces peuples balkaniques qui subissent de plein fouet la brutalité de l’Albanie. On voit bien qu’Emmanuel Macron tient ces propos par lâcheté, finalement. Quand il parle de valeurs européennes, on se demande bien de quoi il peut s’agir, car l’Albanie est un pays majoritairement musulman, comme vous l’avez souligné, c’est un pays notoirement corrompu, un État mafieux, un pays envahisseur des pays voisins et totalement sous domination et sous influence de la Turquie. On ne voit pas bien quelles valeurs nous pourrions partager avec le gouvernement albanais. En tout cas, rien ne justifie d’intégrer ce pays dans l’UE. On voit de surcroît que l’UE, au gré des élargissements successifs, s’est plutôt affaiblie, que beaucoup de pays n’ont pas les mêmes niveaux économiques, sociaux et même démocratiques que les pays d’Europe de l’Ouest et qui ont intégré très vite l’UE, quitte à la fragiliser. La Serbie aurait pu intégrer l’UE mais elle est tenue à la porte car on veut d’abord la forcer à reconnaître l’indépendance du Kosovo, ce qui est un véritable scandale. Derrière tout cela, il y a beaucoup d’hypocrisie. Emmanuel Macron tient une position irresponsable. Cela pourrait affaiblir un peu plus l’édifice européen au lieu de le renforcer.

M. B. Pour Emmanuel Macron, il faut « accompagner ce chemin avec respect et avec des preuves d’amour, c’est-à-dire des investissements ». L’Europe doit-elle investir en Albanie ?

N. B. On ne voit pas bien quels seraient les avantages, pour l’Europe et pour les Français, d'une intégration de l’Albanie dans l’Union européenne. Si, dans la foulée, l’Albanie intégrait l’espace Schengen, cela apporterait des trafics en tous genres, la criminalité et la corruption. Ce sont des propos irresponsables. Emmanuel Macron en est malheureusement coutumier sur la scène internationale. Lorsqu’il s’était rendu en Algérie, il avait expliqué que la culture française n’existait pas et que la colonisation française était un crime. Ce ne sont pas des déclarations de nature à renforcer le prestige et la puissance de la France sur la scène mondiale. Lorsqu’il explique à l’Albanie qu’on partage les mêmes valeurs, c’est un mensonge grossier. Nous ne partageons pas les mêmes valeurs. L’Albanie est un pays sous domination turque, et majoritairement musulman. Ce n’est pas un pays européen, ni historiquement, ni culturellement. Cela ne signifie pas que nous ne pouvons pas avoir de relations diplomatiques convenables ou des relations économiques. Mais il y a un fossé dans les valeurs. Vouloir intégrer l’Albanie à l’Union européenne, c’est affaiblir l’Europe.

M. B. Emmanuel Macron veut trouver un « schéma de réunification ». Faut-il l'interpréter comme un appel à un nouvel élargissement de l'Europe ?

N. B. Emmanuel Macron voudrait intégrer à l’Union européenne tous les pays balkaniques, en niant leurs particularités. Les représentants de Bruxelles se sont précipités pour dire que l’Albanie devait intégrer l’Union européenne. Derrière tout cela, il y a beaucoup d’arrière-pensées politiques et un irréalisme incroyable. Ces pays ne respectent pas du tout les mêmes règles que les nôtres. Leur organisation politique, économique et sociale n’est pas compatible avec les normes actuellement en vigueur dans le marché européen. Leur intégration précipitée aboutirait à un affaiblissement collectif de toute l’Europe. C’est peut-être l’objectif de certains, qui ne veulent pas d'une Europe puissante, d'une Europe civilisationnelle. Ceux-là ne conçoivent l’Europe que comme une sorte de terrain de jeu aux mains de ceux qui ont une conception purement financière de l’économie. Ils considèrent que les nations sont un cadre dépassé et que les peuples sont interchangeables.

Par Marc Baudriller le 19 octobre 2023

Boulevard Voltaire

jeudi 28 septembre 2023

Syriens déplacés au Liban : la France et l’Europe aux abonnés absents !

 

France-Liban : une amitié historique qui oblige

La France et le Liban entretiennent un lien ancien et ininterrompu depuis la charte du 24 mai 1250 dans laquelle Saint-Louis se proclame protecteur des chrétiens maronites. Ce lien fut renforcé au XIXe siècle lorsque la France intervint pour faire cesser les affrontements entre Druzes et Maronites et connaît même son apogée au lendemain de la Première guerre mondiale lorsque le Liban fut « sous mandat français », c’est-à-dire une forme de protectorat français au Moyen-Orient.

En tant que parlementaire, français et chrétien, il me semble naturel et impérieux d’entretenir et de consolider l’amitié avec le Liban en y rencontrant notamment les acteurs institutionnels et religieux ainsi bien-sûr que les dirigeants et députés des partis politiques (Courant patriotique libre, Kataeb et Forces Libanaises).

J’ai également pu longuement m’entretenir avec le président de la République sortant, le général Michel Aoun. Son mandat s’est achevé il y a déjà plusieurs mois maintenant mais il n’a toujours pas de successeur. Une vacance qui illustre, sinon l’instabilité, du moins l’incertitude politique qui frappe le pays.

Un pays en crise(s)

Le pays du cèdre subit une grave crise économique depuis plusieurs années, aggravée par l’explosion du port de Beyrouth en 2020, mais, surtout, le pays fait face à une arrivée massive de déplacés syriens depuis 2013.

Ils sont à présent plus de deux millions dans un pays qui compte à peine quatre millions de Libanais ! Certains sont arrivés pendant la guerre, mais beaucoup d’autres sont arrivés bien après et continuent d’affluer. Ces déplacés représentent désormais plus du tiers de la population actuelle du Liban et ce chiffre s’accroît quotidiennement en raison des nombreuses naissances dans les camps et villages qu’ils occupent.

Les organisations internationales (l’ONU via le HCR) mais aussi l’Union européenne et de nombreuses ONG sont présentes sur place, et apportent des aides financières et matérielles aux Syriens ce qui incite ceux qui sont au Liban à y rester et pousse ceux qui n’y sont pas encore à y venir. Cette politique qui vise à fixer durablement les populations syriennes au Liban est totalement irresponsable et dangereuse.

Il en résulte en effet un Liban asphyxié dont les services publics, sociaux, scolaires et sanitaires sont saturés, dont les infrastructures sont insuffisantes et les ressources énergétiques en pénurie.

Cette grave crise migratoire atteint même l’équilibre religieux du pays. Les chrétiens sont de moins en moins nombreux, représentant sans doute à peine 25% de la population. Pire, ils sont déclassés et les aides apportées par les ONG vont prioritairement aux déplacés syriens.

Rien ne justifie aujourd’hui le maintien de ces déplacés sur le sol libanais : à l’exception du secteur d’Idlib au nord du pays, la Syrie n’est plus en guerre. Les aides internationales, humanitaires et caritatives doivent donc y être déployées pour faciliter le retour des déplacés sur leur terre natale. La politique actuellement menée aboutit à déraciner deux peuples : des Syriens entassés dans un territoire libanais exigu sans perspective d’un avenir meilleur, et des Libanais dépossédés de leur propre pays après tant d’épreuves et de guerres qui les ont meurtris ces dernières décennies.

Entraide et solidarité entre chrétiens d’Orient et d’Occident

J’ai pu échanger avec des représentants d’associations sur place qui viennent spécifiquement en aide aux chrétiens. Parmi elles, SOS Chrétiens d’Orient qui intervient pour les aider à vivre dignement. Les bénévoles réalisent ici un travail admirable. Ils incarnent cette belle jeunesse française engagée qui refuse de céder à la fatalité et qui se bat, concrètement et humblement, pour préserver le berceau de notre civilisation.

Les Libanais ne peuvent hélas plus se contenter d’aides d’urgence. Des solutions pérennes doivent être trouvées pour leur permettre de vivre décemment sur leur terre.

L’urgence de rétablir le dialogue avec la Syrie

Il est temps que l’Union européenne mette fin aux sanctions économiques contre la Syrie (qui touchent en réalité davantage la population que le pouvoir) et que nous privilégions à nouveau la voie diplomatique avec le gouvernement de Damas. Il est en effet illusoire de penser que le retour des Syriens puisse avoir lieu dans des conditions humaines satisfaisantes sans un rétablissement des liens politiques avec la Syrie.

L’Europe et la France ne peuvent détourner le regard et doivent prendre part à ce processus d’apaisement. Nous le devons aux Libanais au nom de l’amitié historique qui unit nos pays bien-sûr, mais n’oublions pas aussi que l’instabilité du Liban aurait des répercussions sur l’ensemble de la région et conduirait à des flux migratoires massifs qui atteindraient nécessairement le continent européen.

Par Nicolas Bay, Vice-Président de R! le 27 septembre 2023

Livre Noir

Nicolas Bay (R!) sur France Info le 27 septembre 2023