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jeudi 3 novembre 2022

Immigration: «Cafouillage organisé»



Sur le thème de l’immigration, les variations du pouvoir exécutif obligent à un effort surhumain de compréhension. On est presque à en appeler Nicolas Boileau au secours, lui pour qui «ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement».

Si Emmanuel Macron et Gérald Darmanin ne font aucun lien existentiel entre immigration et délinquance, ils reconnaissent qu’à Paris ou Marseille, par exemple, un acte de délinquance sur deux est commis par un étranger. On cherche donc la cohérence du discours. En vain… Mais ce n’est pas tout. Le président et son ministre de l’Intérieur assurent aussi vouloir être intraitables avec les clandestins qui refusent de quitter le territoire.

Louable intention, qui ne sera pourtant suivie d’aucun effet puisque le gouvernement veut, dans le même temps, régulariser ceux qui pourraient travailler dans les secteurs touchés par des pénuries de main-d’œuvre. Résultat, la confusion est totale. On croyait renouer avec la fermeté d’un Charles Pasqua, et ce sont les mânes de François Mitterrand qui reviennent, au galop, hanter le paysage politique!

Sur le front de la délinquance, n’en déplaise aux beaux esprits drapés dans leurs indécrottables tabous, la démonstration n’est plus à faire. Les statistiques suffisent à prouver le fameux lien. Sur celui de l’emploi, les chiffres montrent, cette fois, que la France n’a nullement besoin de renforts. Contrairement à l’Allemagne, elle connaît un chômage important et accueille, chaque année, 70.000 actifs supplémentaires, quand nos voisins germaniques en perdent, en moyenne, 100.000. Si l’immigration est une chance pour la France, comme il est de bon ton de le chanter, c’est très loin d’être flagrant pour la sécurité, et aujourd’hui pour le travail.

Alors pourquoi l’exécutif brouille-t-il ainsi son message? Sans doute Emmanuel Macron pense-t-il qu’au sein du gouvernement - notamment entre Élisabeth Borne et Gérald Darmanin - comme de la majorité toutes les sensibilités doivent être ménagées. Ce cafouillage organisé est pourtant une grossière erreur qui ne contentera personne… et surtout pas l’électeur.

Par Yves Thréard le 3 novembre 2022

Le Figaro

lundi 2 mai 2022

Quelle opposition ?



Il faut avoir l’imagination de Jean-Luc Mélenchon pour prétendre savoir à quoi ressemblera l’Assemblée nationale le 19 juin. Le chef de La France insoumise est bien le seul à pouvoir rêver à voix haute de son entrée à Matignon! Habité par un moral de vainqueur, le troisième homme de la présidentielle ne se refuse rien : pas même de détourner le traditionnel 1er Mai syndical en un meeting politique. Ce qu’il fit l’espace d’un discours ce dimanche, place de la République, à Paris.

Dans cinq semaines, à l’issue des élections législatives, la réalité risque d’être bien différente des plans sur la comète dressés par le zélateur d’Hugo Chavez. Les abstentionnistes, qui pourraient être aussi nombreux qu’en 2017 (plus de 50% des inscrits aux deux tours), devraient former le premier parti de France. Et, compte tenu des règles du scrutin, la faible participation ne favorisera pas le jeu des oppositions à Emmanuel Macron. 

À l’exception du bloc central, constitué autour du chef de l’État, les autres camps présentent, comme jamais, d’évidentes faiblesses ou divisions.

Tiraillés de tous les côtés, Les Républicains sauveront peut-être les meubles, mais re trouveront difficilement la centaine de sièges qui faisaient d’eux le premier groupe d’opposition au Palais Bourbon. À leur droite, le Rassemblement national, au faible ancrage local et mal disposé à l’endroit de l’équipe Zemmour, ne peut pas espérer grand-chose. Quant à Jean-Luc Mélenchon, quand bien même il parviendrait à réaliser l’union de la gauche derrière lui, sa radicalité et son intransigeance pourraient lui jouer des tours. S’il arrive à créer la surprise, celle-ci ne devrait pas prendre la forme d’un raz-de-marée.

Des sondages indiquent que beaucoup de Français souhaiteraient une cohabitation. La Ve République en a déjà connu trois. Toutes n’ont pas laissé que des bons souvenirs. Dans un paysage politique dévasté, l’hypothèse reste, en tout état de cause, des plus improbables. En fait, la principale question qui se pose est de savoir qui, face à Emmanuel Macron, portera la voix d’une opposition qui ne soit pas excessive ou déraisonnable.

Par Yves Thréard le 2 mai 2022