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samedi 12 octobre 2024

Foot et antisémitisme : Viktor Orbán donne une leçon à Ursula von der Leyen



L’information a été cantonnée aux colonnes « sport » des journaux, et pourtant, les leçons que l’on peut en tirer dépassent largement le cadre du football. Pour des raisons de sécurité, c’est dans la Hongrie de Viktor Orbán que s’est tenu, jeudi 10 octobre, le match France-Israël (gagné par la France 4-1), de la Ligue des nations.

Matchs sans incident 

Depuis le 7 octobre, Israël a joué sept de ses neuf matchs internationaux en Hongrie. Viktor Orbán s’est, depuis le 7 octobre, montré un soutien indéfectible d’Israël et, fervent amateur de football, il a proposé d’accueillir les footballeurs israéliens. Que n’a-t-on entendu, pourtant, par le passé, au sujet de l’antisémitisme supposé du Premier ministre hongrois, notamment en raison de sa farouche opposition au milliardaire Soros. Viktor Orbán et Benyamin Netanyahou, respectivement Premiers ministres hongrois et israélien, entretiendraient d’excellentes relations, et pour l’ambassadeur d’Israël à Budapest, Yacos Hadas-Handelsman, « la Hongrie [est] une bonne alternative » tant qu’Israël ne peut pas jouer à domicile. Certes, une bulle de sécurité a été mise en place autour de l’équipe israélienne avec un dispositif fourni par Tel Aviv, les entrées ont été extrêmement contrôlées et filtrées, mais le résultat est là : les matchs ont pu avoir lieu sans incident.

De la même façon, le 6 septembre dernier, la rencontre entre la Belgique et Israël, normalement prévue au stade Roi-Baudouin à Bruxelles - c’est la Belgique qui devait recevoir Israël -, avait été délocalisée à Budapest par crainte des « débordements », comme l'on dit pudiquement. « Tous les jours, on a des manifestations et des contre-manifestations liées au conflit en cours. Accueillir Israël, c'est faire entrer la tension géopolitique maximale dans nos quartiers », s’était justifié Benoît Hellings, échevin des Sports : « Recevoir Israël en Belgique, même à huis clos, ça aurait été prendre un risque démesuré de voir un loup solitaire déclencher un nouvel acte terroriste. » C'était, bien sûr, une allusion à l’attaque terroriste en marge du match Belgique-Suède, le 16 octobre 2023, au cours de laquelle deux supporters scandinaves avaient été tués. La Hongrie ne craint pas trop, quant à elle, les fameux « débordements », car les manifestations pro-palestiniennes sont interdites. Et ils sont bien peu, tant dans la communauté musulmane locale très réduite que dans les rangs de la gauche magyare, à y contrevenir. Pour ce qui est du match retour, prévu en France le 14 novembre, le suspense reste entier. Selon la presse spécialisée, la FFF aurait imaginé faire jouer le match dans une petite ville ou encore à huis clos. En attendant, la billetterie n’est toujours pas ouverte.

Une UE exempte d'antisémitisme ?

Sur le site de la Commission européenne, un post publié le le 5 octobre 2021, soit quasiment deux ans jours pour jour avant le 7 octobre, a pris un sacré coup de vieux : y était présentée « la toute première stratégie européenne de lutte contre l'antisémitisme et de soutien à la vie juive » de la Commission européenne, destinée à être « mise en œuvre au cours de la période 2021-2030 ». Suivait un long catalogue de vœux pieux et de déclarations d’intentions censés, en théorie, nous conduire « vers une Union européenne exempte d’antisémitisme » (sic).

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, s’engageait par là « à soutenir la vie juive en Europe dans toute sa diversité » car, déclarait-elle, « l'Europe ne peut prospérer que lorsque ses communautés juives se sentent en sécurité et prospèrent ». C’est une franche réussite. Dans la ville même où siègent la plupart des institutions européennes, il est impossible d’organiser un match de foot avec une équipe israélienne. Et l’infréquentable Viktor Orbán, qu’Ursula von der Leyen a encore violemment fustigé il y a quelques jours, donne en matière de sécurité et de quiétude, pour les populations de confession juive, des leçons au « technotable » Emmanuel Macron. Le 11 juillet dernier, un rapport de l’Agence des droits fondamentaux montrait que 96 % des Juifs en Europe avaient été confrontés à l’antisémitisme au cours des douze derniers mois et qu’en France, 74 % des Juifs estimaient que le conflit en Israël avait eu un impact sur leur sentiment d’insécurité : un des taux les plus élevés parmi les pays sondés (62 %, en moyenne, pour les autres). Pour la Hongrie, le chiffre était… de 9 %.

Et si la bête du Gévaudan, le croquemitaine, le père Fouettard, le monstre du Loch Ness et le yéti réunis en la personne de Viktor Orbán venaient de faire la démonstration d'une intuition partagée secrètement par plus d'un Européen : la meilleure « stratégie » pour lutter contre l'antisémitisme en Europe ne serait-elle pas - ô surprise ! - de lutter contrer l’immigration ?

Par Gabrielle Cluzel le 11 octobre 2024

Boulevard Voltaire

mercredi 7 août 2024

LFI déprime ? Normal, les JO sont aux antipodes de ses « valeurs » !



Ces JO semblaient, pour les membres de La France insoumise, commencer sous les meilleurs auspices. 

La cérémonie d’ouverture, wokiste à souhait - à un petit bémol près du côté de Jean-Luc Mélenchon -, les avait ravis. Las, ils déchantent aujourd’hui. On les sent moroses, déprimés, pour ne pas dire dépressifs. Il y a tout d’abord l'omniprésent triomphalisme cocardier : le sport, on le sait, est le dernier refuge du patriotisme, le seul endroit où il a, en principe, encore le droit de s’exprimer. Mais pour La France insoumise, c’est encore trop. Pour le député LFI de Seine-et-Marne Arnaud Saint-Martin, « la couverture chauviniste des JO sur le service public audiovisuel est pénible ». Selon lui, « tout est cadré en fonction des performances espérées des sportifs français ». Bref, conclut-il : « l’heure est à la régression nationaliste ». Rien que ça.

Il est vrai que l’excellence sportive est aux antipodes des « valeurs » de LFI et de la gauche en général. Les mots clés des JO sont la rigueur, l’émulation, le mérite, l’exigence, le fair-play, le respect des règles imposées et l'acceptation des arbitrages du jury. Chacun cultive ses talents, qui ne sont pas les mêmes pour tous. 

Parfois, comme Léon Marchand, ce sont même des « héritiers », horresco referens, au sens bourdieusien du terme, ayant profité d’un terreau familial et de la transmission parentale. Les épreuves ont lieu en temps limité, tous sur la même ligne de départ. Les médailles ne sont pas décernées sur dossier, entretien, test de personnalité ou contrôle continu. Et les vainqueurs - drapés dans le drapeau tricolore - sont ovationnés comme des héros. Or, pour LFI, seules les victimes autoproclamées ont droit à la considération.

Et si ces JO peuvent se dérouler dans un climat serein, propre à la concentration des sportifs et à la liesse du public, c’est que Paris est sécurisé, quadrillé, surveillé par des forces de l’ordre en nombre, qui contrôlent et mettent hors d’état de nuire les délinquants de tout poil. Sans parler des militaires de Sentinelle. Preuve que quand on veut, on peut. « Les Parisiens sont en train de vivre dans une municipalité "d’extrême droite" sans le savoir », s’amuse l’influenceur Damieu Rieu, « fin des vendeurs à la sauvette, sécurité, absence de hordes de migrants… c’est possible. Ce n’est pas une dictature. C’est même plutôt agréable, apparemment. »

On comprend que cela en défrise plus d’un, du côté de la gauche : ne l’appelez plus Anne Hidalgo mais Anne Hidalliot, maire de Parignan. Qui l’eût cru ? Que les députés LFI se rassurent : cette parenthèse enchantée, comme son nom l’indique, ne durera qu’un court moment. Parce qu’en France, il est convenu - et c'est aussi absurde que désolant - de dénigrer, diaboliser, repousser avec horreur ces recettes éprouvées de réussite dès lors qu’elles ne concernent plus le sport.

Par Gabrielle Cluzel le 6 août 2024

Boulevard Voltaire

lundi 8 juillet 2024

Une victoire indécente et en trompe-l’œil



Halte au sketch, aux congratulations, à la gloriole bruyante. Car ce tapage triomphant n’est qu’un grossier trompe-l’œil. Tout est affaire de récit. Jean-Luc Mélenchon, peu après 20 heures et la publication des résultats signant l’arrivée en tête du Nouveau Front populaire, prend la parole. Il se réjouit bruyamment de la défaite du Rassemblement national qui, à l’écouter, aurait été balayé. Mais la réalité est tout autre : si l’on en croit les estimations à l’heure où j’écris ces lignes, son parti La France insoumise stagne, tandis que le Rassemblement national voit son nombre de députés presque multiplié par deux. 

En nombre absolu, le Rassemblement National a rassemblé près de neuf millions de voix, contre 7 millions pour le NFP et un peu plus de 6 millions pour Ensemble. L’apparent succès du Nouveau Front populaire n’est lié qu’à une entourloupe arithmétique, comme un bilan d’entreprise au bord de la faillite qui maquille son bilan en additionnant adroitement des lignes comptables. Et cette entourloupe va permettre à la gauche de diriger un pays ayant voté à droite.

Évidemment, le résultat du RN n’est pas celui annoncé, loin s’en faut. Bien sûr, le barrage, même usé et essoufflé, a une fois de plus fonctionné. Naturellement, le gouvernement de coalition qui s’annonce à de quoi inquiéter, sur tous les plans : celui de l’immigration, de la sécurité, de la justice, de l’économie, du sociétal… Sans parler des élus plus que douteux : un fiché S - en la personne de Raphaël Arnault, député à Avignon, la ville où a été tué le policier Éric Masson, quel symbole ! - fait son entrée à l’Assemblée nationale. Mais ouf ! grâce au front républicain, le danger RN est écarté. Quel soulagement, la France peut dormir tranquille, n’est-ce pas ?

Sauf que s’il y a une dynamique, elle est du côté du RN. Et ces désistements bricolés ne peuvent effacer le motif même de ces élections législatives : le résultat des européennes.

Parmi tous les commentaires entendus sur les plateaux de télévision, ce dimanche soir, ceux de l’ancien ministre de la Défense et centriste Hervé Morin sont sans doute les plus sages, car les plus humbles et les plus inquiets : que l’on puisse refermer tranquillement le couvercle sur la Cocotte-minute™ des européennes et du premier tour des législatives, bien ligotée avec la vieille grosse ficelle du cordon sanitaire, en s’imaginant que le contenu va se volatiliser est une folie. Il va, au contraire, macérer, montrer en pression. Jusqu’aux prochaines élections. Les présidentielles.

En attendant, place de la République, les émeutes ont commencé. Quand l'extrême gauche perd, elle casse tout. Quand elle gagne, elle casse tout aussi.

Par Gabrielle Cluzel le 8 juillet 2024

Boulevard Voltaire

lundi 1 juillet 2024

Désistements mutuels chez Ensemble et NFP : le macrenchonisme est né !



La journée politique de ce lundi, à gauche, ressemble à une phrase du Journal de Jules Renard : « Ensuite, ils mangèrent un plat de gravier où il y avait quelques lentilles. » Pour les électeurs, la stratégie du plat de lentilles risque d’être dure à avaler. 

La simplicité de la petite combine est biblique, comme l’histoire de Jacob et Ésaü. Et, aussi, parfaitement cynique. Le macronisme et le mélenchonisme jouent la carte du désistement mutuel pour faire « barrage au RN ». C'est le Nouveau Nouveau Front populaire : le macrenchonisme.

Emmanuel Macron l’a annoncé moins de dix minutes après les résultats, appelant à un « large rassemblement démocrate et républicain contre le RN ». Le ni-ni a été pulvérisé, preuve qu’il n’était que pure façade en carton. L'eurodéputé Pascal Canfin s'est lancé aussitôt, sur X, dans un petit calcul arithmétique : « Voilà ce que le désistement veut dire, concrètement : grâce au retrait du candidat LFI arrivé troisième, Élisabeth Borne peut battre le candidat RN. Grâce au retrait du candidat Ensemble arrivé troisième, François Ruffin peut battre le candidat RN. » Elle n’est pas belle, la vie ?

Les électeurs de LFI sont priés de porter fissa leurs suffrages sur l’orfèvre de la réforme des retraites - Olivier Faure « assume » un désistement de la gauche dans le Calvados pour « sauver » Élisabeth Borne face au RN - et les électeurs d'Ensemble sur François Ruffin qui a traité, il y a trois semaines, Emmanuel Macron de « taré ». Tout est normal. Gabriel Attal a solennellement appelé à faire élire 60 députés - il a lui-même donné le chiffre - du NFP, enjoignant ses propres candidats en troisième position à se désister partout où le RN serait en position de gagner.

Même David Guiraud 

Yaël Braun-Pivet, qui avait accusé Mélenchon, en octobre dernier, de lui avoir mis « une cible » dans le dos - il disait qu'elle « campait à Tel Aviv » -, considère aujourd’hui que « pas une voix ne doit aller au RN » et que « l'immense majorité du bloc de gauche est républicain » : « On peut donc sans aucune difficulté appeler à voter pour eux. » Tout au plus émet-elle une réserve pour David Guiraud. Sans doute n’a-t-elle pas remarqué (il faudrait se cotiser pour lui offrir des lunettes) la présence, à la droite de Jean-Luc Mélenchon - propulsé chef du Nouveau Front populaire, puisqu’il a pris la parole le premier dimanche soir et donné la consigne de désistement -, de Rima Hassan, tout sourire avec son plus beau keffieh. 

Quant au cordon sanitaire autour de David Guiraud, il n'a pas fallu plus de quelques heures pour qu'il parte en fumée : dans sa circonscription, le candidat Ensemble, Tarik Mekki, qui n’a pas été qualifié au second tour, a appelé, ce lundi, à voter pour l'ancien député de La France insoumise.

Même Gérald Darmanin 

Quant à Gérald Darmanin, qui avait accusé la NUPES de « bordéliser le pays », on comprend, soudain, mieux son peu d’entrain à dissoudre les officines violentes d’antifas telles que la Jeune Garde : son chef, fiché S - Raphaël Arnault -, devient de facto son allié et sera peut-être, bientôt, son voisin sur les bancs de l’Assemblée, de même qu’Aly Diouara, rival de Raquel Garrido et soutien de l’imam Iquioussen.

Ce serait follement drôle si ce n’était pas si tragique. Sans surprise, la candidate Nouveau Front populaire Leslie Mortreux a annoncé qu’elle se retirait pour faire barrage au RN (Bastien Verbrugghe) et laisser le champ libre à Gérald Darmanin. Précisons quand même, dans ce cas particulier, que l'on ne peut totalement exclure un coup de pied de l’âne. Car le désistement n’est réellement un bonus que si le candidat à soutenir est arrivé deuxième, derrière le RN : dans ce cas, la mise en retrait permet de rebattre les cartes du premier tour. 

Mais Darmanin étant arrivé en tête, c’est se maintenir qui l’aurait en fait aidé, en « figeant » les résultats du premier tour et en gardant captif l’électorat macroniste, dont nul ne peut garantir, en cas de disparition de son premier choix, qu'il ne se rabattra pas, au moins pour partie, sur le RN par peur de LFI.

Le maintien, c’est, du reste, l’option qu’a choisie Loïc Signor, avec l'accord de Gabriel Attal, face à Louis Boyard, arrivé en tête dans la troisième circonscription du Val-de-Marne. Il a tout d’abord annoncé se désister, puis s’est rétracté, dans un communiqué sibyllin qui explique à demi-mot la stratégie tordue ci-dessus citée : « Pour ne pas contraindre [les électeurs] à choisir entre le RN et Louis Boyard j’ai pris la décision de me maintenir au second tour. » Il rajoute, en gras : « Mon maintien est une sécurité, la circonscription ne tombera pas dans les mains du RN. » Il « sécurise », donc, le siège de Louis Boyard. C'est drôlement gentil. Pour en revenir à Darmanin, baiser de la mort ou embrassade sincère, qu’un candidat du Nouveau Front populaire se désiste pour le ministre de l’Intérieur est éminemment symbolique.

Toutes ces petites manœuvres fonctionneront-elles ? Rien n’est moins sûr. 

Car en plus d’une carte d’électeur, n'oublions pas que les Français ont quand même un cerveau. Ils ne sont pas la propriété de leur premier choix. Mais même si le but était atteint à court terme, les conséquences seraient délétères à long terme. Car elles gravent dans le marbre et l'esprit des Français l'existence d'un continuum - le macrenchonisme, donc - entre le Nouveau Front populaire et Ensemble : une différence de degré mais pas de nature. 

L’immigrationnisme échevelé dont Emmanuel Macron a fait grief au NPF, c’est le sien en XXL. Idem pour le wokisme. Ou comment, à force de contorsions, se tirer une balle dans le pied.

Par  Gabrielle Cluzel le 1er juillet 2024

Boulevard Voltaire

jeudi 27 juin 2024

DSK, Jospin, Cotillard… ces prescripteurs (involontaires) du RN



Ils sont les anti-prescripteurs, les Monsieur Jourdain de la politique qui, par leur prose, roulent pour le RN sans le savoir. Les boussoles qui indiquent le sud. Lorsqu’ils montrent une direction, ils donnent une envie irrépressible de partir à toutes jambes dans l’autre sens. Ils se déclarent barrage et sont en fait marchepied. Si gonflés de leur propre importance qu’ils sont incapables de mesurer, ni même d'imaginer, leur effet repoussoir.

Le premier sur le podium est, évidemment, Dominique Strauss-Kahn, toute honte bue, dont les frasques graveleuses ont animé, de façon si poétique, à l’heure où les enfants prennent leur bol de chocolat avant de partir à l’école, les matinales radiophoniques. Il ne semble pourtant pas douter de sa légitimité à donner des leçons de morale. De lui, Sébastien Chenu dit malicieusement qu’il est « probablement [leur] meilleur tract aujourd’hui ». Et encore, le vice-président du Rassemblement national manque un peu d’ambition : la queue de Mickey - sans jeu de mots - aurait été, dans les colonnes de Libération, une pieuse exhortation à repousser le RN cosignée par les pères la vertu Gérard Miller et Olivier Duhamel. Mais rien n'est perdu, la campagne n’est pas terminée.

Le deuxième est Lionel Jospin. Comme barrage, il se pose là. Il est le faire-valoir et escabeau pour le FN devenu RN depuis… 2002, date à laquelle il a été battu, à la surprise générale, par Jean-Marie Le Pen. Cette défaite historique devrait le pousser à la modestie. Faut-il qu’il ait une mémoire de poisson rouge pour l’avoir effacée de son esprit ? À propos de LFI, il déclare : « À part quelques exceptions, on ne peut pas mettre en doute leur engagement républicain. » L’extrême gauche est tellement républicaine qu’elle a empêché sa propre épouse Sylviane Agacinski - opposée à la GPA - de s’exprimer à l’université de Bordeaux  (« Menaces violentes », selon l’université). Sans doute cela, aussi, l’a-t-il oublié.

Marion Cotillard - un peu vintage - a déstocké le pin’s « la jeunesse emmerde le front nazional » de son adolescence et l’arbore fièrement sur son compte Instagram. Une question lancinante demeure : où cette photo a-t-elle été prise ? Dans sa villa de Los Angeles ou de Cap Ferret ? La lutte pour le pouvoir d’achat dans la presqu’île des Petits Mouchoirs, c’est quelque chose. Le cannelé de Frédélian et les huitres rôties de chez Hortense ont tellement augmenté !

Mbappé, quant à lui, échaudé peut-être par son bad buzz « Petit ange », à la tonalité ultra-gauche, au moment de l’affaire Nahel, avance masqué, au sens propre comme au sens figuré : il recommande de voter pour « faire barrage aux extrêmes »… mais sans doute à l’une plus qu’à l’autre - suivez mon regard. Il « n’a pas envie de porter le maillot d’un pays qui ne représente pas ses valeurs », le 7 juillet. Faut-il en conclure, puisqu’il a porté le maillot du Qatar sans moufter, que le traitement indignes des ouvriers africains, qualifié par d'aucuns d’esclavagisme, par le Qatar fait partie de « ses valeurs » ? Que Mbappé se serve de ses pieds pour jouer au foot est normal, et même souhaitable. Qu'il raisonne avec est plus problématique.

Combien d’autres, dans les jours qui viennent, vont rejoindre le petit train antifasciste qui fait « tchou-tchou » contre le RN, la chenille qui redémarre à chaque élection ? Qui peut savoir. Bizarrement, aucun d’entre eux ne semble se rendre compte qu’à chaque étape, un wagon se détache, qui reste à l’arrêt. Ne resteront bientôt que la locomotive et les premières classes. Ça ne suffit pas pour gagner une élection.

Par Gabrielle Cluzel le 26 juin 2024

Boulevard Voltaire

mardi 16 avril 2024

Ersilia Soudais, la madone des mollahs



Les mollahs doivent être drôlement contents : ils peuvent se prévaloir d’un soutien de poids au sein du monde politique français. Dimanche soir, répondant sur X au député PS Jérôme Guedj, la députée de Seine-et-Marne (LFI) Ersilia Soudais a affirmé qu’en « bombardant une ambassade iranienne, Israël [avait] déclaré la guerre à l’Iran » et n’a pas hésité à renvoyer dos à dos les régimes israélien et iranien : « Ces deux pays sont des théocraties. » Pour celle qui se décrit comme féministe internationaliste, Iran et Israël sont donc bonnet blanc et blanc bonnet.

Sur les réseaux sociaux, les commentaires ironiques vont bon train. Pas sûr, de fait, que les crop-tops, les mini-shorts et les maxi-décolletés constituant l’essentiel de l'outfit, comme disent les instagrameuses, d’Ersilia Soudais soient reçus exactement de la même façon à Téhéran et à Tel Aviv.

Comment pourrait l’ignorer Ersilia Soudais, qui en octobre 2023 avait pris la défense, sur le même réseau X, d'Armita Gavarand, « à tout juste 16 ans en état de mort cérébrale parce qu’elle ne portait pas le voile obligatoire » ?

Un voile obligatoire à partir de 9 ans, parce que c’est l’âge de la puberté officielle. L’âge minimum, en Iran, pour se marier est de 15 ans pour les garçons et 13 ans pour les filles. Mais les enfants contractant une union peuvent être encore plus jeunes, si le père y consent. On note, entre 2019 et 2020, une forte augmentation des mariage de fillettes de 10 à 14 ans : 10,5 %. En moyenne, 30.000 cas de mariages de filles de moins de 15 ans par an depuis 2017. « Les religieux justifient cette limite en se référant à l’histoire de Muhammad, qui a lui-même épousé sa troisième femme Aïcha quand elle avait 9 ans »expliquait, en 2021 à La Croix, la sociologue Mahnaz Shirali. La même théocratie, vraiment, en Israël et en Iran ?

Féminisme décolonial

D’aucuns raillent aussi l’ignorance de celle qui, avant d’être députée, fut enseignante. Pour sa défense, Ersilia Soudais n’était pas prof d’histoire-géo mais de français, plus à l’aise, donc, avec les fables, les contes et les romans qu'avec la réalité.

Ersilia Soudais serait-elle aveugle ? Non, mais elle est sourde. Sourde à ce qui ne rentre pas au chausse-pied dans sa grille de lecture. Ersilia Soudais l’a expliqué à Maroc Hebdo, lors de sa visite récente, en février dernier, au Maroc : elle défend « un féminisme décolonial s’inscrivant dans la logique d’une Internationale féministe […] Ce modèle se veut opposé au féminisme blanc […] », un « féminisme blanc » vécu par beaucoup « comme un import occidental ». De même, la polygamie qui sévit en Iran (en même temps que le nombre illimité de mariages temporaires - ou sigheh - contractés pour une période pouvant varier d’une heure à 99 ans) ne saurait faire ciller Ersilia Soudais, car pour la mouvance de ce féminisme décolonial, la monogamie est « imposée et importée »« d'essence et de fondement judéo-chrétien », comme le disait, en 2022, la sénatrice ivoirienne panafricaine Mah Sogona Bamba. Quand la presse française a relevé, il y a quelques semaines, que le nouveau président sénégalais était polygame, le grand ami d’Ersilia Soudais, le journaliste d’Arrêt sur images et de Libération Daniel Schneidermann, a vu dans cet étonnement « le regard colonial, dans son éternité ».

Plus qu’à attendre que ce féminisme décolonial - oxymore d’intensité comparable au véganisme carnivore ou au naturisme collet monté - ne réhabilite l’excision, car comme le rappelait, à ce sujet, la féministe Benoîte Groult (dans Ainsi soit-elle), « quelques colonisateurs eurent le courage de ne pas s’abriter derrière le respect des coutumes indigènes, noble motif pour ne rien faire, et obtinrent de certains gouvernements que des mesures soient prises ». Bref, l’interdiction de l’infibulation, le découragement de la clitoridectomie, c’est colonial ! Du « féminisme blanc » !

En attendant, Ersilia Soudais devrait éviter d’aller rendre visite à ses nouveaux amis dans ses plus beaux atours. Gageons que l’accueil, en bas de l’avion, des Gardiens de la révolution pourrait être assez tiède.

Par Gabrielle Cluzel le 15 avril 2024

Boulevard Voltaire


jeudi 4 avril 2024

Marine Le Pen est grand-mère. Et ce n’est pas si anecdotique


C'est une information exclusive de BV : Marine Le Pen est grand-mère. Sa deuxième fille, Mathilde, a donné naissance, la semaine dernière, à un petit garçon. L’information n’a pas rencontré beaucoup d’écho, et pourtant, elle n’est pas si anecdotique. Il ne s’agit pas seulement d’un « carnet rose » dans la rubrique people, on peut y voir une dimension politique.

En novembre, la journaliste du Point Nathalie Schuck, annonçant l’arrivée future de ce bébé, disait y voir une façon de « parachever la stratégie de normalisation […] entamée depuis des mois pour apparaître comme la "maman des Français" ». La démonstration, développée dans une vidéo, prêtait à sourire car elle laissait imaginer que cette naissance faisait partie d’un plan, comme si Marine Le Pen avait secrètement téléguidé la grossesse, intimé l’ordre à sa fille d’être enceinte pour servir son implacable projet d’accession au pouvoir. Jusqu’où va l’abnégation et la soumission de sa progéniture ! Avec les bêtes immondes, il faut s’attendre à tout.

Un procès de mauvaise foi, car s’il est un politique que l’on ne peut soupçonner de s’être servi de ses enfants pour attendrir, c’est bien Marine Le Pen. Ses enfants, dont elle dit pourtant qu’il sont « sa plus grand fierté », sont très peu médiatisés. « Mes enfants ont le droit de vivre tranquillement, dit-elle dans Gala. Je l'ai été, moi [médiatisée]. J'aurais été plus heureuse si je ne l'avais pas été. Il n'est pas question que j'impose ça aux miens. » Mais l’intuition de Nathalie Schuck n’est pas fausse : dans sa démonstration, elle émettait l’idée qu’ainsi, Marine Le Pen deviendrait la rassurante « Mutti » des Français, comme on appelait Angela Merkel, ou pourquoi pas, donc, la « mamie ». À une petite différence près : Angela Merkel n’avait pas d’enfant. Son généreux et très accueillant « Wir schaffen das! », les bras grand ouverts, au moment de la crise migratoire syrienne sonnait comme un après-moi-le-déluge.

La famille France contre la start-up nation

La maternité, et a fortiori la « grand-maternité », qui vous projette immédiatement un siècle plus tard, eu égard au prolongement de la durée de vie, n’est pas neutre dans votre vision politique. Exit le court-termisme et le « horsolisme » : c’est de la chair de votre chair qu'il s’agit. Et le prosaïsme du quotidien (inflation, harcèlement scolaire, état de l’hôpital…) n’est pas qu’une note dans un dossier : vous l’avez expérimenté. Emmanuel Macron a parlé de réarmement démographique, Marine Le Pen l'a - indirectement - fait.

Notons qu'en la matière, Emmanuel Macron, fidèle à lui-même, a donné une brillante démonstration d'« en même temps », lors de l’émission Au tableau !, au printemps 2017, sur C8 : il a convenu, répondant à la question d’une fillette, qu’il n’avait pas d’enfant… mais il a rajouté aussitôt qu’il avait sept petits-enfants. Être grand-père sans être père, c’est ce qu’on appelle l’acmé du progressisme sociétal. Chapeau, l’artiste !

Quelle importance, direz-vous ? Il n’est pas besoin d’être parent pour être compétent. Chacun a, bien sûr, des raisons qui lui sont propres, un parcours personnel, pas toujours choisi : on se souvient que l’ancienne Première ministre écossaise Nicola Sturgeon avait révélé avoir fait une douloureuse fausse-couche. Mais, alors que l’horizon est si chaotique, savoir que les politiques qui décident de l’avenir du pays ont aussi leur progéniture embarquée dans le rafiot aux allures de radeau de la Méduse a quelque chose de rassérénant.

On le sait, l’expression « bon père de famille » a disparu du Code civil. Pour satisfaire ces dames dans un esprit de parité, il eût mieux valu la conserver et lui adjoindre celle de « mère de famille ». Qui, soucieuse des siens, vérifie par exemple que la porte de sa maison est bien fermée à double tour. De fait, lors de la campagne de la dernière présidentielle, à Saint-Rémy-sur-Avre, en Eure-et-Loir, Marine Le Pen avait promis de diriger la France comme une « mère de famille ». La famille France contre la start-up nation, en somme. La deuxième étant en liquidation, nombre de Français, si l'on en croit les sondages, semblent avoir envie de tenter la première.

Par Gabrielle Cluzel le 4 avril 2024

Boulevard Voltaire

dimanche 18 février 2024

Nicolas Dupont-Aignan (DLF) demande la suppression totale du droit du sol



Gabrielle Cluzel accueille, cette semaine, Nicolas Dupont-Aignan Dans votre salon. Le président de Debout la France et député de l'Essonne confirme que son mouvement souverainiste sera bien présent aux européennes sous l'appellation « Les amoureux de la liberté ». Pour Boulevard Voltaire, il balaie tous les grands sujets chauds du moment : l'injonction du Conseil d'État au sujet de CNews, guerre en Ukraine, Mayotte, référendum sur le droit du sol, loi sur les dérives sectaires, etc.

Par Gabrielle Cluzel le 17 février 2024

Boulevard Voltaire


mardi 23 janvier 2024

Sandrine Rousseau, mère de 3 enfants, se réjouit de la baisse de la natalité



Accordons-lui (au moins) le mérite d’être claire : pour Sandrine Rousseau, « la baisse de la natalité est une BONNE nouvelle ». Relayant un extrait de son intervention sur Sud Radio, elle a mis, sur X, l’adjectif en majuscule, pour bien enfoncer le clou.

Dans le passage mis en avant par la radio, l’élue NUPES a commencé par affirmer, contre toute attente et surtout contre les chiffres de l'INSEE, qu’« il n’y [avait] pas de baisse de la natalité ». Jean-Jacques Bourdin la reprend : « Si, si, si, depuis l’après-guerre, il y a une baisse de la natalité. » C'est qu'il n'a pas compris : ce n’est pas le confetti France qui intéresse Sandrine Rousseau. Elle persiste et signe : « Il n’y a pas de baisse de la natalité depuis l’après-guerre sur la planète. »

 

Une baisse rassurante

Selon la députée écologiste, la baisse de la natalité est même « rassurante ». Les yeux fermés, les mains en avant comme une télévangéliste en transe, elle évoque la situation tragique de « l’Amazonie [qui] est à un point de bascule ». Elle répète trois fois, crescendo, comme une incantation, le mot « Amazonie ». Jean-Jacques Bourdin tente, une nouvelle fois, de la faire revenir sur le sol français : « Est-ce qu’il faut encourager les Français à avoir des enfants, mettre en place une politique familiale ? » La réponse tombe, sans appel : « On n’a pas besoin, pour notre système économique, d’avoir plus d’enfants. » Pour étayer ses propos, elle s’enveloppe, avec majesté, dans sa toge universitaire : « Je le dis en tant qu’économiste. »

Comment donc compte-t-elle, faute d’enfant, financer la retraite pour laquelle elle a manifesté l’an passé ? Par capitalisation ? Pour une élue de la NUPES, convenons que ce serait original. Et si nous n’avons pas besoin d’enfants, pourquoi aurions-nous besoin de l'immigration - ces enfants de substitution ? Ces questions ne lui seront pas posées. Au-delà de l’aberration économique, on aura surtout compris que les mères - c’est-à-dire une majorité écrasante des femmes - ne peuvent nullement espérer être défendues par cette grande prêtresse de la déesse Gaïa, toute féministe qu'elle se prétende, pour laquelle la défense de l'écologie est une fin en soi et non un objectif environnemental dont le centre est l’homme.

Croyante mais pas pratiquante 

C'est presque explicite : soutenir les mères serait entretenir un vice qui n’est pas souhaitable, comme un SDF qui irait boire les sous qu'on lui donne. Notons que Sandrine Rousseau - et ce n’est pas le moindre de ses culots - est une malthusienne croyante mais pas pratiquante. À l'instar d'Amélie Oudéa-Castera, elle est championne dans la discipline gym acrobatique, catégorie faites-ce-que-je-dis-ne-faites-pas-que-ce-que-je-fais : Sandrine Rousseau a trois enfants, c’est-à-dire une famille nombreuse, bien au-dessus de la moyenne nationale. En mars 2021, elle confiait à Reporterre s’être engagée en politique parce qu’elle « [avait] très peur pour l’avenir de [s]es enfants, à tel point qu’ [elle n’arrivait] même plus à lire les écrits des chercheurs et chercheuses sur le changement climatique ».

La protection de sa progéniture est une motivation tout à fait louable, sauf si celle-ci se fait au détriment des voisins : pour la sauvegarder de ses propres enfants sur le radeau de la Méduse Terre, elle aimerait autant que ceux des autres n'existent pas, histoire de leur faire un peu d'oxygène, n'est-ce pas ? Doit-on lire en filigrane, dans sa déclaration, qu'à l'instar d'Yves Cochet, loin de vouloir aider les mères, elle jugerait plus utile de les pénaliser ? « Renversons notre politique d’incitation à la natalité. » Il faut « [inverser] la logique des allocations familiales. Plus vous avez d’enfants, plus vos allocations diminuent, jusqu’à disparaître à partir de la troisième naissance ! »écrivait Yves Cochet, dans L’Obs, en 2019. Sandrine Rousseau et Yves Cochet ont, d’ailleurs, contribué au même ouvrage collectif Politiques de l’Anthropocène. Penser la décroissance. Économie de l’après-croissance. Gouverner la décroissance (Presses de Sciences Po, 2021), il n’est donc guère étonnant que leurs pensées convergent. Après le « secourisme à l'envers » en fin de vie, bientôt les allocations négatives et la politique familiale dissuasive ? 

La gauche n’arrête pas le progrès.

Par Gabrielle Cluzel le 22 janvier 2O24

Boulevard Voltaire