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jeudi 13 juin 2024

Vent de folie chez les LR



Qui est fou ? Éric Ciotti, si l’on en croit nombre de hiérarques des LR. Ces caciques que l’on qualifie, en vertu de la captation d’héritage du gaullisme effectue par ce parti - qui n’a, pourtant, plus grand-chose à voir avec le gaullisme historique -, de « barons ». Durant cette folle journée du 12 juin 2024 et au lendemain de l’annonce fracassante d’Éric Ciotti de s’entendre avec le Rassemblement national pour les élections législatives, on a voulu faire passer le président des LR pour une sorte de fou, de forcené, prêt à faire Fort Chabrol au siège des LR à deux pas de l’Assemblée nationale. N’a-t-il pas, ce mercredi matin, fait fermer les portes, renvoyé les permanents chez eux pour travailler en télétravail, refusé de participer au bureau politique convoqué par la secrétaire générale Annie Genevard, bureau politique qui allait se prononcer sur son exclusion du parti ?

Ciotti, un quasi-délinquant, si ce n’est un criminel... contre l'humanité

Pour un peu, on allait en appeler à la force des baïonnettes. Geoffroy Didier, eurodéputé sortant (ou sorti, puisqu’il avait été relégué à la onzième place sur la liste de Bellamy), n’a pas hésité à déclarer que, s’il fallait, on délogerait Ciotti « même physiquement » de son bureau (avec les flèches de l’arc républicain ? Pas très « État de droit », ça !). Et la sénatrice Agnès Evren affirmant qu’il fallait mettre « hors d’état de nuire Éric Ciotti à son parti politique »

Ciotti, un quasi-délinquant, si ce n’est un criminel… contre l’humanité, ça va sans dire. On se croirait dans un roman de Dumas pendant les guerres de religion. À l’époque, Ciotti aurait été coincé dans un sombre corridor, poignardé, passé au fil de l’épée, dépecé et, in fine, jeté dans la Seine. On n’en est plus là, mais l’idée y est, ce 12 juin. Finalement, le bureau politique a exclu le député des Alpes-Maritimes, qui conteste cette décision, car cette instance n’a pas été convoquée conformément aux statuts (pour des gens si légalistes, c’est curieux !). À l’issue de ce bureau politique, courte déclaration d’Annie Genevard, entourée de tout un tas de « barons », dont Wauquiez, Barnier, Tabarot (présidente de la commission d’investiture), Larcher, Pécresse (4,78 % à la présidentielle de 2022…), Copé, Fasquelle (trésorier du mouvement) : « La France a besoin d’une parole forte et indépendante, distincte de l’impuissance du "en même temps" et du saut dans l’inconnu du Rassemblement national… », déclare-t-elle, oubliant d’évoquer une troisième hypothèse : le « saut dans le chaos » que représenterait la victoire de l’extrême gauche à travers ce « Front populaire » dans lequel LFI a la part belle. 

Alors, déclare-t-elle, en lisant le texte qu’elle n’a visiblement pas rédigé : « Entre la bien-pensance dénuée du moindre courage et la rage dénuée de la moindre crédibilité qu’incarne La France insoumise, l’Assemblée nationale aura besoin d’un pôle de stabilité… » Voici donc où en sont réduites les ambitions d’un parti qui gouverna si longtemps la France : être un pôle de stabilité à l’Assemblée nationale. Il est vrai qu'avec 4,78 % à la présidentielle de 2022 et le triomphe romain aux élections européennes de 2024, avec 7,3 %, on ne peut espérer mieux. L’histoire des LR comme parti ayant vocation à être leader de la vie politique française est donc close. On le savait depuis longtemps, mais on continuait, chez LR, à faire semblant. Genevard, en quelque sorte, entérine cette réalité en positionnant son mouvement en « pôle de stabilité ».

 

Comme des aliénés dans la camisole de force que Mitterrand leur a confectionnée

Éric Ciotti, lui aussi, a entériné cette réalité. Mais en refusant de devenir « La France soumise ». Certes, on lui reprochera d’avoir négocié avec le RN dans le dos des instances dirigeantes de son parti. Certes, on dira qu’il a peut-être voulu sauver sa « circo » des Alpes-Maritimes. Certes. Mais ce n’est sans doute pas lui qui est fou. Les fous, ne sont-ce pas ces « chapeaux à plume », comme les qualifie lui-même Ciotti, sur le plateau de Christine Kelly, ce mercredi soir ? En bande folle, comme un monôme halluciné, ils vont au suicide, apparemment contents d'eux-mêmes, prêts à continuer à agir les mains liées dans le dos, comme des aliénés, dans la camisole de force que Mitterrand leur a confectionnée, il y a quarante ans de ça. À la fin de cette folle journée, sur le plateau de CNews, Ciotti n'a pas l'air fou du tout. « On n’a fait que 7 % », rappelle-t-il, réaliste. Réaliste, à la différence de ce « cénacle de chapeaux à plumes déconnectés de la réalité des Français », ajoute-t-il. 

Des Français qui lui disent : « Unissez-vous, la France est en danger. » Pas fou mais lucide, lorsqu'il décrit ce qui est en train de se passer : l'affrontement de deux blocs. Le bloc de gauche, dominé par LFI (avec même le NPA, rappelle-t-il), d'un côté et, en face, le bloc de droite qui veut sauver la France (on comprend que, dans cette vision, la Macronie est morte). Pas fou, Ciotti, lorsqu'il s'exclame : « Mélenchon serait donc plus fréquentable que Bardella ? » Pas fou, Ciotti, qui revendique les milliers de messages reçus qui l'encouragent dans sa démarche. Pas fou, enfin, lorsqu'il révèle qu'il a négocié autour de 80 circonscriptions avec le RN. Ce soir, il est libre, Ciotti, lorsqu'il affirme vouloir casser les codes. C'est peut-être sa seule folie !

mercredi 22 mai 2024

Macron s’envole pour la Nouvelle-Calédonie compliquée : pour renverser la table ?



Ce mardi 21 mai, Prisca Thevenot, à l’issue du Conseil des ministres, a annoncé qu’Emmanuel Macron partait pour la Nouvelle-Calédonie afin d'y installer une « mission dans le cadre d’un dispositif global ». La porte-parole du gouvernement a cru bon de préciser que « le président de la République part en [NDLR : on dit « pour », mais c’est pas grave] Nouvelle-Calédonie dans un esprit de responsabilité ». Sans blague, heureusement ! Cette dame va vraiment nous faire regretter Sibeth Ndiaye. Passons. Au fait, qui est en position pour être le « missionnaire » ? On parle d’Édouard Philippe. suivre.

Gabriel Attal reste à la maison

En tout cas, cette annonce est une surprise qui ne nous surprend pas ! Une surprise, car on avait compris, la semaine dernière, que le dossier avait été enlevé au ministre de l’Intérieur pour être confié au Premier ministre. C’est sans doute la preuve qu’Emmanuel Macron est le vrai Premier ministre. Et, en même temps (!), ce n’est pas une surprise car, au bout de sept ans, on commence à connaître un peu Emmanuel Macron, qui est un peu du genre « Décidément, il faut que je fasse tout, ici ». 

Son côté Tintin qui va sauver à lui tout seul le monde. Sûr de lui et dominateur, baratineur hors pair et confiant dans sa capacité de séduction, on imagine qu’il mettra à profit les vingt-cinq heures d’avion pour bûcher à fond le « dossier ». Vole-t-il vers cette Nouvelle-Calédonie compliquée avec des idées simples, comme le général de Gaulle vers l’Orient ? On l’ignore, mais qu’on aime ou qu'on n’aime pas Macron, il faut lui reconnaître cette capacité à descendre au fond des dossiers comme l’officier mécanicien dans la salle des machines, et à remonter sur le pont pour briller devant les passagers de la croisière tout estomaqués.

On l’a vu cet hiver à la tâche lors de ce débat improvisé avec les agriculteurs en colère au Salon de l’agriculture. Sans doute, comme à l’accoutumée, va-t-il retirer sa veste, remonter les manches de sa chemise. Et ça fera de belles images. On notera qu’il ne part pas seul : Gérald Darmanin, qui était pourtant considéré comme « disqualifié », la semaine dernière, par le FLNKS, Sébastien Lecornu, qui fut en charge du dossier lorsqu’il était aux Outre-mer, et, tout de même, le ministre actuel des Outre-mer, Marie Guévenoux - l'occasion de montrer qu'elle existe -, sont du voyage. Gabriel Attal reste à la maison. Un désaveu pour le tout jeune Premier ministre ? « Tu es gentil, mon garçon, mais là, faut que tu laisses faire les grands. » 

À moins qu’il ne soit assigné à Matignon pour mieux préparer son débat face à Jordan Bardella, jeudi soir... Mais nul doute que celui qui parlera encore et encore à Nouméa, ce sera Macron. L’homme a un minimum de culture historique, aussi, on prie pour qu’il se garde de paroles définitives du genre « Je vous ai compris »...

Mais si l’on ne peut que souhaiter, pour la France et la Nouvelle-Calédonie, que Macron réussisse à mettre autour de la table tous les interlocuteurs et à apaiser les tensions, on ne peut s’empêcher cependant de penser qu'il ne va pas seulement là-bas pour installer une mission. Que c’est, pour lui, l’occasion de tenter de reprendre la main sur l’opinion, ici en métropole, à moins de trois semaines d’une dégelée annoncée aux européennes. 

Il ne renversera sans doute pas la tendance et la table. Mais ça se tente, car il n’a plus rien à perdre.

Boulevard Voltaire

vendredi 15 mars 2024

Macron face aux Français : demain, la guerre ?



« Le Président va rendre compte de la situation de manière pédagogique », rapportait la presse, ce jeudi matin. Les Français ne sont pas des enfants, mais bon… En tout cas, il était grand temps qu’Emmanuel Macron s’adresse directement aux Français après ses saillies va-t-en-guerre des dernières semaines et après que le Parlement a débattu et s’est prononcé, cette semaine, sur l’accord bilatéral de sécurité signé récemment entre la France et l’Ukraine. Grand temps, d’autant que les deux tiers (68 %) de nos compatriotes considèrent que le chef de l’État a eu tort de prendre des positions ressenties comme bellicistes, selon un sondage Odoxa-Backbone Consulting réalisé fin février pour Le Figaro.

Des propos qui ont « créé une forme de peur », soulignait un député Renaissance, selon La Nouvelle République, qui ajoutait : « Il faut rassurer, dire qu’on fait tout pour éviter la guerre, que la France use toujours de la voie diplomatique et qu’il ne faut jamais abandonner l’Ukraine. » Alors, ce jeudi soir, interviewé par Anne-Sophie Lapix et Gilles Bouleau, Emmanuel Macron a donc voulu faire de la pédagogie. Tout du moins au début de son interview. « Vous êtes assis devant moi. Est-ce que vous êtes debout ? Non. Est-ce que vous excluez de vous lever, à la fin de votre interview ? À coup sûr vous n’allez pas l’exclure. » Référence à ses récents propos selon lesquels il n’excluait pas d’envoyer des troupes au sol en Ukraine. La comparaison est un peu boiteuse, mais le Président semble content de sa trouvaille. A-t-il rassuré les Français ? Sans doute pas. A-t-il convaincu que la France use toujours de la voie diplomatique ? Encore moins. Qu’il ne faut jamais abandonner l’Ukraine ? Oui, sur ce point, le message a été clair.

Macron n’a pas rassuré.

Tout d’abord sur la situation tactique sur le terrain, là-bas, sur la ligne de front : « La situation est difficile », reconnaît le Président. « Une litote », lui répond Gilles Bouleau. Traduire : la situation tactique est mauvaise pour les Ukrainiens. Mais Macron va plus loin en rappelant que « la guerre est sur le sol européen », que « ce n’est pas une fiction loin de nous ». C’est une évidence que les Français savent mais ne veulent sans doute pas croire, il faut bien l'avouer. Et donc, Macron n’a pas voulu rassurer en affirmant que c’est la sécurité de l’Europe, de la France et des Français qui se joue là-bas. « Guerre existentielle pour la France et l’Europe », dit-il carrément. Sur l’envoi de soldats français en Ukraine, a-t-il rassuré ? Non plus. « J’ai peut-être raison de ne pas être précis. » 

C’est la fameuse « ambiguïté stratégique ». On n’en saura pas plus. Pourtant, Le Monde révélait, ce 14 mars, que Macron, le 21 février dernier, dans un salon de l’Élysée, aurait déclaré « d’un air dégagé » : « De toute façon, dans l’année qui vient, je vais devoir envoyer des mecs à Odessa. » Propos que dément formellement le Palais, ce même 14 mars. Ambiguïté stratégique.

« Nous sommes prêts », assène-t-il...

Rassurer sur le fait que « les choses bougent » en tentant de faire oublier le cinglant désaveu qu’il a reçu de la part des alliés après ses propos lors de la conférence de soutien à l’Ukraine, le 27 février dernier. On verra cela après qu’il aura rencontré Scholz, ce 15 mars. Macron a voulu rassurer quant à nos capacités militaires. Nous avons un « modèle d’armée complet », se plaît-il à rappeler. Un modèle que les esprits chagrins qualifient d’« échantillonnaire »... Et le chef des armées d'évoquer notre récent engagement au Sahel pour prouver notre capacité opérationnelle. Bouleau a beau rétorquer que ce n'était pas tout à fait le même genre d’ennemi et de guerre que celle qui est menée en Ukraine, Macron balaie l’argument d’un revers de manche. « Nous sommes prêts », assène-t-il. La France produit moins de cent obus par jour, ce que consomment les Ukrainiens en quelques minutes ? On va chercher partout dans le monde des munitions et accélérer les cadences. Tout ça coûte cher. 4,8 milliards ont déjà été donnés à l’Ukraine. 3 de plus sont prévus. Va-t-il falloir emprunter sur les marchés internationaux ? Ne pas l’exclure. Et de rappeler ce que l’on a fait durant le Covid (« Quoiqu'il en coûte » ?) pour tenir le pays à flot. Donc, se préparer à ce que la France s’enfonce un peu plus dans la spirale infernale de l’endettement.

Et la diplomatie, dans tout ça ? « Je suis disposé à mener les discussions », affirme Macron. Ce n’est sans doute pas lui qui les mènera, ces discussions, le jour où elles viendront... « Mais en face quand on ne dit pas la vérité… », ajoute-t-il. 

En clair, le temps où la France se positionnait comme une grande nation diplomatique est révolu.

Par Georges Michel le 14 mars 2024

Boulevard Voltaire

vendredi 8 mars 2024

Soutien à l’Ukraine : « sans limites », vraiment ?



 « Aucune limite », a annoncé Emmanuel Macron aux chefs de partis représentés au Parlement, ce jeudi 7 mars. Soyons précis : aucune limite à quoi ? « Au soutien à l’Ukraine. » Si on se tient stricto sensu au vocabulaire militaire codifié par les règlements et repris dans le lexique des termes utilisés dans la Loi de programmation militaire 2019-2025, on pourrait se rassurer, par rapport à l’éventualité d’un engagement direct de la France en Ukraine. En effet, le soutien n’est-il pas « la combinaison et l’organisation des différentes activités mises en place au profit des forces engagées afin de leur permettre de se déployer, vivre, agir, combattre, se mettre en condition et durer ». Soutenir l’Ukraine, ce n’est donc pas s’engager directement à ses côtés.

Inquiétant...

Est-ce cela qu’Emmanuel Macron a dans la tête ? Est-ce cela qu’il a voulu dire en s’adressant à Bardella, Ciotti, Faure, Roussel, Bompard et Tondelier, pour ne citer que les leaders des oppositions ? On peut se le demander, si l’on écoute les réactions à chaud, au sortir de l’Élysée, des leaders de gauche. Bompard : « Je suis arrivé inquiet et je suis ressorti plus inquiet encore puisque le président de la République, loin de revenir sur les déclarations qui étaient les siennes la semaine dernière, les a confirmées. » Tondelier : « Extrêmement inquiétant de voir un président de la République qui explique, face à quelqu’un qui détient l’arme nucléaire que nous détenons nous-mêmes, qu’il faut montrer que nous sommes sans limite. » Roussel, regrettant que la position de la France ait changé depuis deux ans : « Il n’y a plus de ligne rouge, il n’y a plus de limites. » Bien évidemment, il y a de quoi être inquiet pour l’Ukraine. 

Et Macron, cartes à l’appui, paraît-il, a fait part de sa propre inquiétude. En effet, le journaliste Régis Le Sommier, dans un entretien avec le général (2S) Vincent Desportes, chez nos confrères de Radio Courtoisie, le 5 mars, soulignait que « si l’Ukraine a marqué quelques points et d’ailleurs, dernièrement encore, en coulant un navire russe en mer Noire, sur le terrain malheureusement, les nouvelles ne sont pas bonnes du tout depuis la prise d’Avdiïvka [ville de l’oblast de Donetsk]. L’Ukraine est à la peine pour rétablir une ligne de défense à l’ouest. » La Russie ne peut et ne doit pas gagner, s’évertue à répéter Emmanuel Macron, mais si l’Ukraine doit gagner, il semble bien, sauf à ce que l’OTAN rentre dans la danse (mais là, on changerait de dimension…), qu’elle ne puisse gagner cette guerre.

La France le peut-elle ?

Sauf, peut-être, à soutenir « sans limite »… Et que ce soutien « sans limite » soit apporté par tous les Occidentaux. Les mots ont un sens. « Sans limite », ça veut dire, en langage d’aujourd’hui, « open bar ». La France le peut-elle ? Une France avec un État surendetté. En plus des douze milliards d’économies annoncées pour cette année, trois mois à peine après le vote du budget sous perfusion de 49.3, c’est maintenant vingt-cinq milliards d’économies qu’il va falloir trouver en 2025. Les caisses sont vides, le bar est vide, mais « open bar » ! 

C’est en cela que les propos de Macron sont inquiétants. Sauf à ce que cela ne soit que du bluff. Mais la France peut-elle se permettre de bluffer sur une scène internationale où notre pays est passablement discrédité à cause des déclarations intempestives de notre ministre des Affaires étrangères – je veux parler d’Emmanuel Macron…

Diaboliser le RN en en faisant le faux nez de Poutine

Mais on l’aura compris, il est un front qui inquiète tout autant, sinon plus, Emmanuel Macron : c’est celui de la bataille des élections européennes. Éric Ciotti, patron des LR, ne s’y est pas trompé. En sortant de l’Élysée, outre la réaffirmation du soutien de son parti à l’Ukraine et la dénonciation du « caractère irresponsable et dangereux de l’envoi de troupes au sol », le député des Alpes-Maritimes a dit au chef de l’État qu’« il serait inacceptable d’instrumentaliser le conflit ukrainien à moins de 100 jours des élections européennes ». Et c’est bien ce qui risque d’arriver. Diaboliser le RN en en faisant le faux nez de Poutine. On en a eu un avant-goût, la semaine dernière, lorsque Attal a pratiquement qualifié le RN de parti de l’étranger, pour ne pas dire de collabo. Des propos, du reste, que Jordan Bardella a dénoncés auprès d’Emmanuel Macron. Le débat de la semaine prochaine au Parlement sur la question du soutien à l'Ukraine promet...

« Sans limites » ? Une question doit être posée : Emmanuel Macron est-il sans limites ? On peut s’en inquiéter.

Par Georges Michel le 7 mars 2024

Boulevard Voltaire

mercredi 28 février 2024

Macron, le va-t-en-guerre



La dernière fois que la France a été en guerre contre la Russie, c’était en Crimée, de 1853 à 1856. À une époque où la main-d’œuvre n’était pas chère, la France expédia dans cette lointaine contrée plus de 300.000 hommes aux côtés des Britanniques, des Turcs et des Sardes pour s’opposer à l’expansionnisme russe alors que l’Empire ottoman était en plein déclin. Près de 100.000 de nos soldats ne revinrent pas de cette guerre. À l’époque, la France, qui faisait encore jeu égal avec l’empire des Romanov, dépensa dans ce conflit plus de 145 millions de livres sterling quand la Russie, elle, y laissa 144,5 millions de livres et le Royaume-Uni plus de 164 millions de livres. Un rappel historique qui devrait permettre de remettre les choses en perspective, alors qu’Emmanuel Macron, lundi soir, lors de la conférence internationale de soutien à l’Ukraine qui réunissait 21 chefs d’État et de gouvernement à l’Élysée, a fait une déclaration on ne peut plus belliqueuse.

« En dynamique, rien ne doit être exclu. »

Envoi de troupes au sol occidentales en Ukraine ? « Il n’y a pas de consensus aujourd’hui pour envoyer de manière officielle, assumée et endossée [comprendre que l’Occident a déjà « du monde » là-bas ? Probablement] des troupes au sol. Mais en dynamique, rien ne doit être exclu. » « En dynamique » : qu’est-ce que veut dire ce charabia ? Que ce qui était exclu hier ne l’est plus aujourd’hui et encore moins demain. Et d’ailleurs, ajoute le Président : « Nous ferons tout ce qu’il faut pour que la Russie ne puisse pas gagner cette guerre. » Tout. C’est-à-dire ? Tout, sauf à ce que Macron bluffe ou soit fou (ce qu’on exclut par construction intellectuelle), cela veut bien dire jusqu’à envoyer des troupes au sol. « Tout », cela pourrait signifier de tenter le grand jeu diplomatique avec la Chine, les pays arabes, la Turquie (encore et toujours elle !), voire Israël, qui n’a peut-être pas trop envie que l’attention des Occidentaux se détourne de son sort pour regarder nach Osten. Mais, visiblement, dans ce grand « tout », l’option diplomatique semble écartée. Mais avons-nous encore une diplomatie française ? Avec un Séjourné au Quai d'Orsay, on peut en douter.

Emmanuel Macron, avec ses petits bras musclés...

Mais que nous fait donc là Macron ? Alors qu’effectivement, chez nos alliés, ça ne se bat pas spécialement au portillon pour aller mener une guerre fraîche et joyeuse dans les plaines d’Ukraine, qu’aux États-Unis, la Chambre des représentants à majorité républicaine bloque toujours un plan d’aide à l’Ukraine de 60 milliards de dollars, que Biden, à quelques mois de l’élection présidentielle, ne doit pas spécialement avoir envie de se lancer dans une guerre mondiale, que le chancelier allemand vient de rejeter la demande de l’Ukraine de lui livrer des missiles de longue portée Taurus, Emmanuel Macron, avec ses petits bras musclés, n’exclut aucune option. Son Premier ministre a du reste confirmé la chose, ce mardi matin, sur le plateau de RTL : Emmanuel Macron « a été clair sur le sujet », a déclaré Gabriel Attal.

On en sourirait s’il ne s’agissait de la France

Donc Macron, dans son petit treillis bien repassé, impérial, déclare qu’il veut maintenir une « ambiguïté stratégique ». C'est ce qu'on doit appeler le « brouillard de la guerre ». La réponse du Kremlin ne s’est pas fait attendre, laconique et sans ambiguïté : ce ne serait pas « dans l’intérêt des Occidentaux » que d'envoyer des troupes au sol en Ukraine. Encore moins ambiguë, la déclaration du chancelier allemand Olaf Scholz, ce mardi matin : « Il n'y aura aucune troupe au sol, aucun soldat envoyé ni par les États européens ni par les États de l'OTAN sur le sol ukrainien. » Et le gouvernement italien, à son tour, de s'aligner sur la position de Scholz. Lundi, c’était « Rantanplan, on va leur percer le flanc », comme chantaient les grognards de Napoléon, baïonnette au canon. Mardi, il nous reste Rantanplan tout court. On en sourirait s’il ne s’agissait de la France.

A-t-on les moyens ?

Car la question de fond, au-delà des déclarations va-t-en-guerre de plateau télé et de salles de conférences bien douillettes, est double. Primo, a-t-on les moyens de faire la guerre à la Russie qui a le temps, la profondeur stratégique et qui fonctionne en économie de guerre ? Juste deux chiffres. La France serait capable de tenir, avec ses forces terrestres dans le cadre d’un conflit de haute intensité, au mieux un front de 80 kilomètres, selon l’expert de défense Jean-Dominique Merchet. Le front russo-ukrainien s’étire sur près de 1.000 kilomètres… Secundo, et c’est sans doute la question essentielle : les Français sont-ils prêts à voir revenir des centaines, voire des milliers de tués et de blessés, estropiés à vie dont certains termineront en faisant la manche dans le métro ? Car, il faut voir la réalité en face, c’est bien ce qui se passerait si l'on participait à cette guerre qui est plus proche de celle de 14-18 que de celle des étoiles. Les Français sont-ils prêts à payer le prix d'une guerre dont ils ne sont peut-être pas convaincus que c’est la leur ?

Par Georges Michel le 27 février 202

Boulevard Voltaire

mercredi 21 février 2024

Sus à CNews : maintenant, Laurence Ferrari



Comme tout est bon dans le cochon, tout est bon pour dézinguer CNews. Après les injonctions, les admonestations, les condamnations, voire damnations, voici venu le temps des déceptions et des insinuations. Plus malin, plus pervers, peut-être aussi.

Laurence Ferrari, « contaminée »...

Ainsi, Hapsatou Sy, collègue de plateau de Laurence Ferrari durant quatre ans dans l’émission Le Grand 8 sur C8, interrogée par Télérama, qui consacre un long article au cas CNews, déclare : « Je ne la reconnais pas. Elle a été contaminée par le virus CNews. Je préfère garder le souvenir d’une femme qui se positionnait en faveur de l’anti-FN, l’antiracisme, qui n’aurait jamais adhéré à cette ligne éditoriale. » Donc, c’est parti, on y va, on va jouer sur la corde sensible en évoquant le bon vieux temps, lorsqu’on était les meilleures copines du monde. Ferrari ferait presque pitié : elle a été « contaminée », donc, ce n’est pas tout à fait de sa faute, à cette pauvre Lolo, c’est presque une victime, vous comprenez. 

Autant dire que CNews lave les cerveaux. Il faudrait peut-être voir à ce que le Parlement se saisisse de l’affaire, crée une commission d’enquête sur les dérives sectaires de CNews. Les auditions d’Olivier Dartigolles et Karim Zéribi, hommes de gauche, comparses réguliers de Laurence Ferrari dans son émission Punchline, seront particulièrement intéressantes. Mais on trouvera bien un spécialiste, oscillant entre la psychologie à deux balles et la sociologie de bazar, pour expliquer qu’on est là, typiquement, dans un cas école de manipulation et d’instrumentalisation, etc.

Même Michel Drucker ne comprend pas !

Donc, on ne reconnaît plus Laurence Ferrari. Pour les besoins de la cause, Télérama est même allé chercher le pape de la télé française, Michel Drucker, histoire de voir s'il n'avait pas une bulle d'excommunication sous la main. Que dit-il, bien assis au fond de son canapé ? « C’est une énigme, aujourd’hui. J’ai le souvenir de quelqu’un de doux, ne se mettant pas en avant. » Une gentille fille, quoi ! Elle serait donc devenue méchante. Parce que le monde est simple, pour Michel Drucker, lorsqu’il le contemple du haut de ses Alpilles : il y a les gentils, ceux qu'il invite sur son plateau du dimanche après-midi (au fait, ça existe encore, cette émission ?), et les méchants, ceux qu'il n’invite pas. Par exemple, les membres de la tribu Le Pen. 

Mais ça, c’est une autre histoire… Donc, effectivement, Laurence Ferrari est une énigme : gentille ou méchante ?

Laurence Ferrari, une mercenaire

Une énigme ? Mais Hapsatou Sy l’a peut-être résolue, cette fichue énigme. « Elle a des factures à payer comme tout le monde, et c’est peut-être ce qui la maintient là. » On passe donc aux insinuations. Rien de tel que les rosseries, du genre « Vous voyez ce que je veux dire », jetées, l'air de rien, comme ça, au virage de la conversation, par l'ancienne bonne copine. En fait, Laurence Ferrari est une mercenaire. Elle reste à CNews pour la gamelle. Parce qu’ailleurs, soit dit en passant, on est bien d’accord, personne ne reste là où il est parce qu’il a des factures à payer. Non, non, du tout.

Laurence Ferrari voit les choses en face

Réponse de Laurence Ferrari : « Je suis alignée avec moi-même, ce que je pense et mes années d’expérience. Je mène ma barque comme je l’entends. » Et lorsqu’on se souvient de la question posée par Laurence Ferrari à Emmanuel Macron, lors de sa conférence de presse de janvier, on comprend ce que ses mots veulent dire. Une question, longue d’une minute vingt, qui a passablement agacé le président de la République, tant par le fond que par la forme. Extrait : « Vous voulez qu’ils [les élèves dans les écoles] chantent la Marseillaise, pratiquement un jeune sur deux ne sait pas situer la Révolution française. 48 % des professeurs se sentent censurés lorsqu’ils enseignent l’Histoire… », etc. 

Tout cela dit sur un ton très calme, avec sérénité. Et il fallait le faire devant une salle compassée, avec un Président arrogant, se prenant pour de Gaulle, là-haut, sur son estrade. Alors, Laurence Ferrari n’est peut-être pas douce – quoique ! -, mais elle est courageuse : elle voit les choses en face. C’est pas mal, ça, par les temps qui courent, non ?

Par Georges Michel le 21 février 2024

Boulevard Voltaire


jeudi 8 février 2024

Remaniement : Macronie, un canard sans queue ni tête



Avant-hier, la chose semblait quasiment acquise. Eh bien, non, François Bayrou ne pilotera pas le mammouth. D’ailleurs, il ne pilotera rien du tout. Il ne sera pas ministre. Pas certain que cela émeuve beaucoup les Français. Mais ce petit feuilleton autour de cette arlésienne qu’est devenu le remaniement est révélateur. Juste un mois que Gabriel Attal est Premier ministre et l’effet « waouh » est en train de faire « pschitt ». Juste un mois, ou plutôt déjà un mois, et ça a drôlement ramé pour sortir les numéros complémentaires du loto gouvernemental.

Attal se prend la barre dans la figure...

Certes, le capital sympathie du plus jeune Premier ministre de la Ve République semble intact, mais le sondage de l’IFOP donnant Marine Le Pen vainqueur face à Gabriel Attal au second tour de l’élection présidentielle fait « boum ». Une véritable bombe. Certes, ce n’est qu’un sondage et on est encore à trois ans de l’échéance, mais un tel résultat sondagier est une première. En décembre dernier, nous évoquions la barre fatidique des 30 % d’intentions de vote, tous scrutins confondus. Une autre barre symbolique vient donc de sauter. Et c’est Gabriel Attal (Emmanuel Macron aussi) qui se prend la barre dans la figure.

Va comprendre, Bayrou !

Mais revenons à ce qui pourrait passer pour un refus d’obstacle de la part du cavalier François Bayrou. Avant-hier quasi-ministre et, ce jeudi 8 février, quasi-opposant pour cause d’absence « d’accord profond sur la politique à suivre ». Un changement de pied qui relève de la haute école d’équitation ! Et, en même temps, Bayrou, avec sa cinquantaine de députés MoDem, reste dans la majorité. « Va comprendre, Charles », comme disait le regretté André Pousse au non moins regretté Guy Marchand en faisant son tiercé ! Que s’est-il donc passé entre Emmanuel Macron et François Bayrou ? Le premier a-t-il humilié le second qui aurait été trop gourmand ? Peut-être, probablement, sans doute. Mais ce n’est pas le sujet et, là encore, les Français s’en moquent.

Bayrou est « mauvaise copine »

Le sujet, c’est d’abord que Bayrou dresse un triste tableau de la France après bientôt sept ans de macronisme (un septennat !), pointant le « gouffre qui s’est creusé entre la province et Paris » et une « rupture entre la base et les pouvoirs  ». Bayrou découvre la Lune. Preuve à l’appui, avancée par le Palois : onze ministres sur quinze franciliens, pas un ministre du sud de la Loire. C’est vrai. Mais Bayrou est bien « mauvaise copine », comme chantait Jacques Brel. N’a-t-il pas contribué à la victoire de Macron et ne fait-il partie intégrante de la majorité depuis le début de l’aventure ? Mais ce constat de Bayrou sur la « rupture entre la base et les pouvoirs » est très incomplet. Les Français veulent majoritairement que l’on stoppe l’immigration (et pas seulement l’illégale), mais l’ex-futur ministre de l’Éducation nationale se garde bien de l’évoquer. On ne se refait pas.

Et maintenant, Belloubet à l'Éducation nationale 

L’autre sujet révélé par ce feuilleton Bayrou, c’est qu’on ne sait plus vraiment où l’on va, avec Macron. Du reste, l’a-t-on jamais su ? À part vers toujours plus d’Union européenne. Ainsi, Nicole Belloubet succède à Amélie Oudéa-Castéra. Passons sur ce nouveau changement de pied. Après l’épisode calamiteux Pap Ndiaye, avec Attal à l’Éducation nationale, on allait voir ce qu’on allait voir et mettre tout le monde au pas à l'Éducation nationale, et pourquoi pas l’uniforme ! 

Et là, Macron nomme celle qui qualifiait, dans un rapport publié en 2016, le retour de l’autorité et le port de la blouse de « fariboles ». Là encore, « va comprendre, Charles »… Histoire de rééquilibrer le navire qui penche à droite depuis la première vague du dernier remaniement. 

La Macronie ressemble de plus en plus à un bateau ivre. Pire : à un canard sans queue ni tête.

Par Georges Michel le 8 février 2024

Boulevard Voltaire