jeudi 2 mars 2023
mercredi 1 mars 2023
La gauche vent debout contre le service national universel
Si le service national obligatoire (SNU) est critiquable aisément sur le fond, la gauche y préfère la forme. Alors que le gouvernement réfléchit à instaurer une participation obligatoire au SNU pour les lycéens de certains départements, la NUPES voit, comme souvent, rouge. Ainsi, le député LFI Bastien Lachaud a dénoncé, ce mardi, dans l’Hémicycle, un endroit où l’on « chante La Marseillaise, on marche au pas et ou on y vit une parodie de préparation militaire ». L’horreur, quasiment le nazisme, comme dirait l’autre. La cause de la colère du député Lachaud mais, au-delà, de la NUPES : « Embrigader les lycéens pour mettre les jeunes au pas », accuse le député Insoumis qui défend la conscription voulue par Jean-Luc Mélenchon « s’adressant à de jeunes adultes payés au SMIC et leur permettant de s’engager dans des causes sociales ou écologiques ». Un député du RN s'agace : « Oui, en fait, il veut payer les bloqueurs de routes d’Extinction Rebellion. »
En se positionnant contre le SNU, la gauche envoie aussi un message aux lycéens mobilisés contre la réforme des retraites : elle agit pour eux ! On pourra noter, d’ailleurs, le paradoxe d’une extrême gauche opposée à l’embrigadement des jeunes dans le SNU mais partisane d’une instrumentalisation des mineurs dans sa lutte politique contre les retraites. LFI n’est évidemment pas seule à pourfendre le SNU. Ainsi les élus EELV Sandra Regol et Benjamin Lucas ont dénoncé la pratique de « pompes » exécutées à 22 h 30 dans la cour d’un lycée strasbourgeois. Une punition inconcevable pour la gauche qui y voit un châtiment corporel promu par un SNU « paternaliste et réactionnaire ». Un verbatim qu’on retrouve notamment chez le très gauchiste syndicat SUD Éducation, qui qualifie le SNU de « surenchère réactionnaire et militariste ». Des positions qui rendent effectivement difficile l’acceptation d’un éventuel uniforme à l’école, comme l’avait défendu le député RN Roger Chudeau dans la niche parlementaire du groupe de Marine Le Pen.
Une attaque qui passe mal, dans les rangs de la majorité : celle-ci rappelle que Jean-Luc Mélenchon avait « proposé la même chose ». Dans les faits, la conscription voulue par l’ancien candidat à l’élection présidentielle est très éloignée du SNU pour les raisons citées ci-dessus, mais elle ne fait surtout pas l’unanimité au sein de la NUPES, et notamment du côté d’Europe Écologie Les Verts. Dans une conférence de presse, cet après-midi, EELV a par ailleurs reconnu que l’acte I de la NUPES touchait à sa fin et qu’il fallait « réfléchir à un acte II », admettant que l’accord avait été négocié très rapidement. En d’autres termes, La France insoumise n’est pas porte-parole de la NUPES et, sénatoriales et européennes approchant, il y a fort à parier que les divergences programmatiques entre les différentes formations vont s’épaissir jusqu’à paraître insurmontables. En cela, le SNU va bénéficier de la division de la gauche et du désintérêt du Rassemblement national.
Mais c'est aussi le coût - près de deux milliards d’euros pour « un caprice présidentiel », selon les termes de Lachaud - qui sucite l'opposition de la NUPES : celle-ci reproche au gouvernement de trouver deux milliards pour cette structure et pas 60 millions pour les repas à un euro pour les étudiants.
En bref, fidèle à ses vieux tropismes ringards à force d’être jeuniste, la gauche de la gauche a définitivement rompu avec ce qui l’avait rendu politiquement légitime à la fin du XIXe siècle : l’éducation. Et ce n’est pas l’état de l’Éducation Nationale, qui aurait bien besoin de hussards noirs, qui pourrait démentir ces propos.
Par Marc Eynaud le 28 février 2023