On l’a échappé belle : « Si Marine Le Pen avait été élue, les Français vivraient dans un pays sorti de l’euro, pro-Poutine et qui aurait, entre-temps, administré le vaccin Sputnik à sa population, remis en cause l’IVG et le mariage pour tous. » Rien que ça ! Pendant qu'on y est, pourquoi pas le rétablissement de la gabelle et du supplice de la roue ?
Le député européen Stéphane Séjourné, secrétaire général de Renaissance, vient de livrer cette prophétie rétrospective dans un tweet catastrophiste, résumant ainsi la quintessence de son entretien dans Le Parisien du mercredi 12 avril. Bien entendu, l’on est tenu de prendre ces affirmations lapidaires - que d’aucuns pourraient qualifier de mensongères au regard du programme présidentiel de Marine Le Pen et de ses prises de position sur les questions internationales - pour argent comptant, vu qu’elles émanent du camp de ceux qui savent et savent faire. La diabolisation ne payant plus, on va maintenant sur le terrain de la crédibilité, de la capacité à gouverner. Pour ce macroniste de la première heure, le RN incarne « l’incompétence, l’incurie, les choix désastreux » qu’il convient de « pointer », autrement dit de dénoncer. Par déduction et convention de manœuvre, la Macronie, elle, incarne la compétence, le sérieux, les choix judicieux. La preuve après six ans d’Emmanuel Macron au pouvoir !
La parole de la France sur la scène internationale est inaudible, quand elle n’est pas contre-productive : pour preuve les tournées africaine et chinoise récentes d’Emmanuel Macron. Notre pays connaît un taux d’endettement inédit, sa balance commerciale est catastrophique, les faillites d’entreprises se multiplient et pourraient dépasser le niveau pré-pandémie. L'école, la Justice sont dans l'état que l'on sait. Les Français subissent une crise sociale, politique, démocratique, disent même certains, aggravée par l’attitude d’un Président qui déroule obstinément sa feuille de route. Mais on a échappé au pire en 2022.
Emmanuel Macron et son gouvernement vont de revers en revers. Même l’autorité présidentielle semble remise en cause. Des petites choses, vous me direz, mais c’est un signe. Ainsi, après le petit camouflet sur la loi de programmation militaire, le Parlement vient de rejeter la candidature de Boris Ravignon, maire LR de Charleville-Mézières, à la tête de l’Agence de la transition écologique (ADEME), proposée par le président de la République. Certes, ce rejet est justifié par le fait que Ravignon refuse de quitter sa mairie. Choix mal ficelé, mal préparé du Président ? En tout cas, on retiendra que ce rejet est un nouveau désaveu pour l'hôte de l'Élysée. Mais à part ça, tout va bien. Et nous avons échappé, nous dit Stéphane Séjourné, aux dix plaies d’Égypte en 2022…
Maintenant, on ne peut imaginer qu’un homme aussi intelligent que Stéphane Séjourné se laisse aller à des propos aussi caricaturaux au sujet de Marine Le Pen et du Rassemblement National par simple idéologie. Outre, sans doute, la perte de sang-froid d’une Macronie sur la défensive, on peut y voir une tentative de contre-feu face à un adversaire sur sa droite qui caracole en tête dans les sondages et semble s’affirmer comme une alternative sérieuse face à une gauche dominée par LFI avec ses excès et sa promesse de chaos.
Le dernier sondage de Cluster17 pour Le Point révèle que 64 % des Français voient désormais Marine Le Pen gagner en 2027. Seul un tiers des Français est favorable à la constitution d’un front républicain NUPES-Renaissance-LR, dans l’hypothèse d’un second tour face à Marine Le Pen.
Certes, 2027 est encore loin, mais au rythme où vont les choses…
Par Georges Michel le 13 avril 2023