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vendredi 27 mai 2022

Holodomor 2.0

 

Par Xavier Moreau , homme d’affaires, analyste politico-stratégique installé à Moscou et fondateur du site Stratpol le 26 mai 2022 ♦ Les gouvernements kiéviens qui se sont succédé ont tenté jusqu’à aujourd’hui de justifier leur russophobie à cause de la grande famine (Holodomor) qui eut lieu dans les années 1930 en URSS. Cette accusation a pour but d’une part de faire endosser les crimes du bolchévisme à la Russie et aux Russes et d’autre part à faire croire à l’existence d’un peuple ukrainien qui aurait en commun d’avoir été « génocidé » par « l’occupant russe ». Ces deux présupposés sont totalement faux.

En 1921, lorsque les bolchéviques fondent l’Ukraine, elle n’est qu’un fantasme chez quelques intellectuels kiéviens comme Mikhaïl Grouchevski qui ont proclamé une indépendance imaginaire à Kiev en 1917. Dominés sans pitié par les Polonais jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, puis par les Autrichiens, les radicaux issus de l’ouest de l’Ukraine actuelle fournissent déjà à l’époque les plus gros bataillons mais toujours largement minoritaires dans le pays. Les habitants de l’est et du sud de l’Ukraine ne sont pas intéressés à former une république commune avec ceux de l’Ukraine du centre et de l’ouest. Fiers de leur identité ouvrière et minière, ils adhèrent au projet du camarade « Artem » (Fedor Sergeev de son vrai nom) qui forme la République de Donetsk-Krivoï Rog.

À la mort de ce dernier en 1921, les bolchéviques mettent fin à ce projet car ils veulent contrebalancer le centre et l’ouest de l’Ukraine « paysan et bourgeois » par le prolétariat ouvrier de l’industrie et des ports. Ainsi naît la République socialiste soviétique d’Ukraine, véritable prison des peuples dans laquelle Staline enfermera après la Seconde Guerre mondiale des Roumains et des Hongrois qui luttent depuis pour leur identité. Staline qui est au début des années 1920 commissaire aux nationalités, lance immédiatement l’ukrainisation forcée de ce territoire, obligeant les populations locales à parler un dialecte auquel les scientifiques soviétiques tentent laborieusement de donner une grammaire. L’ennemi de Staline est et sera toujours « le chauvinisme grand Russe ».

Cette ukrainisation forcée fait le bonheur des nationaux bolchéviques ukrainiens comme Alexander Choumski et Mykola Khvylovy. Ils sont encore célébrés aujourd’hui en Ukraine sous le prétexte qu’ils furent purgés en 1933. Ainsi l’Holodomor n’est pas un crime russe mais un crime bolchévique ordonné par le Géorgien Staline et mis en œuvre en Ukraine par un Polonais, Stanislav Kossior qui était alors le secrétaire général du Parti communiste d’Ukraine. Le bolchévisme est un soulèvement des minorités de l’empire russe contre la Russie et l’orthodoxie, il faut comprendre cela pour évaluer justement ses crimes.

Ainsi la Grande famine n’est pas un génocide car le peuple ukrainien vient à peine d’être créé par Staline, mais un populicide exercé contre les paysans en tant que classe sociale. Staline est un bolchévique fanatique qui pense que la Nouvelle politique économique mise en place en 1921 par Lénine et qui permet l’apparition d’une classe de petits paysans propriétaires est une trahison du marxisme-léninisme. Il souhaite également exporter les récoltes pour les vendre à l’étranger afin d’acheter des machines-outils qui permettront l’industrialisation à marche forcée. Les Koulaks serviront aussi de main-d’œuvre servile pour exploiter dans des conditions épouvantables les forêts russes, toujours pour l’exportation.

L’Holodomor frappe donc les paysans vivant sur le territoire de l’Ukraine actuelle, du sud de la Russie et du Kazakhstan. Les nationalistes ukrainiens de l’ouest de l’Ukraine revendiquent ce carnage pour justifier leur haine de la Russie et des Russes, alors qu’eux-mêmes n’en furent pas victimes car vivant sous la domination polonaise jusqu’en 1939. Dans les années 1920, bien avant de tuer des Russes, les bandéristes assassinaient régulièrement des fonctionnaires polonais et ils célébraient la République socialiste soviétique d’Ukraine où finit d’ailleurs par s’installer Mikhaïl Groutchevski.

Ainsi l’Holodomor ne divise pas les Russes et les Ukrainiens mais elle les rapproche. Aujourd’hui le blocus d’Odessa par la flotte russe protège les Ukrainiens d’un Holodomor 2.0. Conscients de la crise alimentaire qui approche, Bruxelles et Washington veulent s’emparer du blé ukrainien alors que la Russie et l’Inde ont gelé leurs exportations pour éviter l’inflation dans leurs propre pays. Staline a affamé son peuple mais au moins il importait des machines-outils. Zelenski est prêt au même sacrifice, mais ce sera pour acheter des armes qui de toute manière ne feront que retarder l’inéluctable chute du régime kiévien.

mardi 17 mai 2022

Ukraine : Otan en emporte l’Eurovision

 

Par Pierre Boisguilbert le 17 mai 2022 ♦ Les jeux étaient faits à l’avance. L’idéologique médiatique l’avait décidé. L’Ukraine devait gagner l’Eurovision, l’Ukraine a gagné l’Eurovision. On se demande même pourquoi on a organisé le concours.

Un vote du public décisif

On pourrait s’arrêter là, mais on aurait tort. Le triomphe du groupe ukrainien a été le fait du vote massif du public. Ce sont donc bien les médias dominants qui font la loi. C’est vrai pour l’élection présidentielle française avec la diabolisation de certaines idées, c’est vrai aussi pour l’Eurovision avec la béatification de certaines causes.

Les résistants virtuels des réseaux sociaux ont donc exhibé leur conviction dans un « selfie » pro-ukrainien.
Ils auraient sans doute voulu exclure la Russie… mais c’était déjà fait par les organisateurs !

L’Eurovision a sacré l’Ukraine en 2022, grâce à un soutien massif du public. Un record a d’ailleurs été battu : c’était la première fois dans l’histoire du concours de chant qu’un pays obtenait autant de points (439) de la part des téléspectateurs.

Avant le vote du public, l’Ukraine ne faisait pas partie du trio de tête. Ce qui est consternant, c’est le sentiment de ce public de participer à l’histoire alors qu’il ne fait que suivre des faiseurs d opinions. Ces derniers, largement discrédités, ont, grâce à l’Ukraine, retrouvé tout leur pouvoir d’influence. On ne peut que le constater.

On pourrait déjà dévoiler le palmarès du futur festival du cinéma de Cannes, autre exemple parfait de la soumission à l’air du temps médiatique. S’il y a un film ukrainien, il sera forcément récompensé et tout ce qui pourrait alimenter la russophobie ambiante fera l’objet d’une dévotion compassionnelle.

Le président ukrainien, qui ne doute de rien et continue à militer pour la 3e guerre mondiale, verrait bien la future édition de l’Eurovision à Marioupol. Le groupe vainqueur a remercié le public pour cette reconnaissance de la culture ukrainienne que Poutine veut nier. En fait de culture ukrainienne, quelques notes traditionnelles ont servi d’introduction à une musique hip-hop sans aucune identité. Plus mondialiste tu meurs !

Le patriotisme célébré ?

« Stefania », le titre que le groupe ukrainien Kalush Orchestra a interprété, est un hommage à la mère du chanteur, Oleh Psiuk. Mais, depuis l’invasion du pays par la Russie, nombreux sont ceux qui y voient un symbole patriotique de l’Ukraine comme figure maternelle. La mère-patrie célébrée par l’Europe mondialiste, c’est tout de même amusant. Mais il faut reconnaitre leur engagement nationaliste aux chanteurs du groupe. Après le concours de chant, les membres du groupe reviendront dans leur pays pour joindre les forces combattant la Russie. L’un des danseurs est d’ailleurs resté à Kiev pour défendre la capitale ukrainienne.

Le nationalisme a-t-il donc remporté l’Eurovision ? C’est une autre manière de voire les choses. L’identité des peuples reste tout de même bien absente du traitement médiatique. La France, elle, arrive avant-dernière avec un chant en breton. Cette identité culturelle-la, celle d’un peuple historique européen autour d’une langue n’intéresse pas les médias… voire les révulse !

Pour gagner la prochaine fois, les Bretons devraient sans doute faire du rap transgenre en wolof ou être attaqués par Poutine.


jeudi 12 mai 2022

Guerre en Ukraine. L’ombre de Staline

 


Par Eric Delcroix, juriste, essayiste et écrivain, auteur de Droit, conscience et sentiments le 12 mai 2022♦ La guerre russo-ukrainienne, c’est le point Godwin à tout va : la lutte entre le « nouvel Hitler » (Poutine) et les « nazis ukrainiens » d’Azov , héritiers de Stepan Bandera. Une guerre des propagandes aussi ridicule que peu explicative. Pour Eric Delcroix, c’est le souvenir du stalinisme et des morts de la grande famine (Holodomor) qui explique la résistance ukrainienne. Tout comme les possibles crimes de guerre de l’armée russe, héritière des traditions de  violences soviétiques de la seconde guerre mondiale. Un point de vue à (double) contre-courant à prendre en compte dans une analyse plurielle des événements, en gardant en tête qu’il reste difficile d’acquérir une connaissance objective de la situation sur le terrain.
Polémia

 

La Russie de Vladimir Poutine n’a cessé de faire l’objet de provocations, malveillances et humiliations de la part des États-Unis et de leurs vassaux de l’OTAN. Récemment, l’Allemagne, le premier et le plus fidèle de ces vassaux, a cru pouvoir s’offrir une audace sans conséquence morale, savoir établir avec la Russie le fameux gazoduc Northstream II. Se serait-il passé en coulisse à point nommé quelque chose que le public ignore, à l’heure où ce gazoduc allait être mis en service ?

Quoi qu’il en soit, l’armée russe est entrée en Ukraine le 24 février, dressant contre cette agression la population ukrainienne, apparemment composante russophone incluse. Ne réussit pas l’Anschluss qui veut, réalité qui peut échapper à un ancien agent du KGB…

L’hystérie « antinazie » partagée

Avec une déraison très assumée, l’homme qui a fait du 9 mai, commémoration de la capitulation du III° Reich, la fête nationale russe cultive ainsi une mythologie communiste, celle de l’antifascisme moral. Cette mystique, redoutablement efficace, a été créée par le VII° congrès du Komintern (1935) à l’initiative de Staline et répandue par ce génie de la propagande que fut Willi Muezenberg (1989-1940). D’où les « fronts populaires » qu’a connus l’Europe ça et là (en France encore de nos jours avec l’immarcescible le « Front républicain »).

Le succès de ce proto wokisme soviétique fut à long terme fatal à l’URSS, les marxistes eux-mêmes étant passés au fil du temps du matérialisme historique au moralisme idéaliste…

Or que constate-t-on dans le discours de Poutine ? L’omniprésence de la justification suprême, savoir la lutte contre les « nazis » ou « néonazis ». Et, non seulement cette incongruité burlesque ne fait pas rire, mais la rhétorique est reprise par le président ukrainien pour qui ce sont les Russes qui sont des « fascistes » ! Évidemment il n’y a, de part et d’autre ni hitlériens ni fascistes. Et si les nationalistes ukrainiens célèbrent Stepan Bandera (1909-1959), qui lutta un temps contre les communistes au côté de la Wehrmacht, cela n’en fait pas des « nazis ».

De part et d’autre, l’anti-soviétisme ne fait pas recette dans l’élite, alors même que la terre d’Ukraine est remplie des charniers soviétiques et que l’Holodomor (famine provoquée par Staline en 1935) et illustré par le film l’Ombre de Staline[i], avec des millions de morts, paraît très présent dans la mémoire populaire sous-jacente. Itou pour le Goulag…

En l’absence de catharsis, le mensonge perdure

Nombre de chroniqueurs regrettent l’absence de « Nuremberg du communisme », naïveté de ceux qui croient que la justice peut faire bon ménage avec la politique et l’Histoire.

En revanche, il serait temps que toutes les archives soviétiques puissent être ouvertes aux chercheurs. Mais ce n’est pas la voie choisie par Poutine qui, peu avant l’agression contre l’Ukraine a dissout l’association Mémorial, dont c’était l’un des objets. Les anciens soviétiques n’ont pas fait leur catharsis…

Évidemment, il ne serait plus possible de maintenir la fête du 9 mai, si les Russes se voyaient rappeler que leurs ancêtres tombés par dizaines de millions étaient largement mus par la Terreur[ii]. Les vagues d’assauts, mal commandées, étant suivies de troupes dont le rôle était d’abattre les récalcitrants. Le NKVD avait droit de vie ou de mort sur tout militaire quel qu’en fut le grade. Combien des membres du « Régiment des immortel », cher au président russe, ont-ils été tués par les agents staliniens ?

L’Ukraine de Zelensky ne sort pas de ce jeu. Les autorités de Kiev ne rappellent même pas le passé soviétique : saisissant ! Si l’armée russe se comporte si mal, c’est qu’elle est l’héritière de l’Armée soviétique. Tout le reste n’est que propagande.

En conclusion

Cette lutte où chacun voit en l’autre un suppôt de Hitler a quelque chose de grotesque qui devrait modérer l’enthousiasme des tiers observateurs que nous sommes.
Cela étant, il n’est pas possible, à part soi, de ne pas réprouver l’attitude de la Russie en Ukraine et de ne pas avoir de la sympathie pour une population en butte à une soldatesque incorrigiblement néo-soviétique.
Il n’est pas possible non plus de ne pas admirer l’héroïsme des défenseurs de Marioupol, face à une armée sans merci, car historiquement étrangère au sens de l’honneur militaire.

Hitler est mort, pas Staline dont l’ombre plane toujours sur la Russie et l’Ukraine.

[i]       Film d’Agnieszka Holland, 2019.
[ii]      Voyez, la Guerre d’extermination de Staline, par Joachim Hoffman, Editions Akribeia, 2012.


mercredi 11 mai 2022

Ukraine : l’Europe doit se désolidariser des Américains

 


Les Américains jettent de l’huile sur le feu…

Organisant la mobilisation générale contre la Russie, les Américains jettent de l’huile sur le feu. Accuser Poutine des pires ignominies, le traiter de boucher, parler de crimes de guerre et de génocide, le menacer de la Cour pénale internationale, c’est se couper de toute négociation possible avec lui. Ensuite, soutenir l’armée ukrainienne en s’engageant massivement à ses côtés au point de planifier maintenant des livraisons d’armes pour vingt milliards de dollars, c’est prolonger, voire étendre le conflit avec les pertes matérielles et principalement humaines qui en résultent. Enfin, c’est surtout s’engager ouvertement dans la guerre contre les Russes avec la volonté de les battre militairement.

… après avoir cherché à piéger les Russes

Un projet dont on peut d’ailleurs se demander s’il ne s’inscrit pas dans une stratégie conçue de longue date. Tout se passe en effet comme si les Américains avaient cherché à piéger le maître du Kremlin en refusant toute négociation avec lui sur la sécurité en Europe et en annonçant ensuite que pas un soldat américain ne viendrait défendre l’Ukraine. À la manière dont ils avaient poussé Saddam Hussein à l’invasion du Koweit, ils auraient ainsi délibérément créé les conditions de la réaction agressive des Russes pour, dans un deuxième temps, organiser contre eux une mobilisation générale de tout le monde occidental.

Mais si Poutine est acculé, le pire devient possible

L’erreur dramatique des Américains est que Poutine n’acceptera jamais de subir une défaite militaire. Et, s’il n’est pas question ici de défendre l’intéressé et de nier sa responsabilité première dans le conflit et dans les drames, voire les exactions qui en résultent, le devoir des dirigeants confrontés au chef d’État russe n’est pas d’aller pleurer dans les médias comme certains responsables américains mais d’agir lucidement en tenant compte des contraintes géopolitiques comme des réalités psychologiques.

A cet égard, il est clair que si Poutine est acculé à subir une défaite militaire, il utilisera l’arme nucléaire. On peut penser et espérer que ce sera, dans un premier temps au moins, l’arme nucléaire tactique sur le théâtre du champ de bataille, mais personne ne peut prévoir ce qu’il adviendra après une telle escalade de la violence guerrière.

L’Ukraine doit mener une guerre qu’elle aurait pu éviter…

Alors pourquoi prendre un tel risque ? S’agit-il de la souveraineté de l’Ukraine ? Un pays ne cesse pas d’être souverain si ses dirigeants, en sages politiques, tiennent compte des contraintes géopolitiques auxquels il est soumis. Faute d’avoir voulu le faire, les Ukrainiens ont été entraînés dans la guerre d’une façon pour le moins paradoxale : ils subissent une invasion russe pour avoir voulu se protéger d’une invasion russe (en cherchant à adhérer à l’Otan) ! Le président Zelensky porte donc sa part de responsabilité dans cette guerre en n’ayant pas accepté pour son pays un statut de neutralité, statut qui n’a rien au demeurant de déshonorant. Aussi est-il mal placé pour exiger aujourd’hui de tous les pays occidentaux qu’ils s’engagent sans réserve à ses côtés dans une guerre qu’il aurait peut-être pu éviter par une attitude plus prudente. Une guerre dans laquelle lui et son peuple sont d’ailleurs de surcroît instrumentalisés par les États-Unis.

… et se trouve instrumentalisée par les Américains pour détruire la puissance russe

Si les Américains prennent le risque d’une escalade militaire avec la Russie, c’est en effet pour un enjeu à leurs yeux bien supérieur à celui du devenir de l’Ukraine. Il s’agit pour eux d’en finir avec la puissance russe. Une puissance qu’ils ne contrôlent pas et dont ils détestent les valeurs politiquement incorrectes. Mais cet acharnement américain contre la Russie montre en tout cas combien les États-Unis peinent à prendre en compte les réalités nouvelles du monde actuel. Après leur victoire sur l’URSS ils ne sont pas devenus en effet les maîtres du monde car ce dernier n’est pas passé d’une organisation bipolaire à une structure unipolaire mais à une planète structurée en plusieurs pôles de puissance. Leur ennemi, ou leur adversaire, comme le nôtre, n’est donc pas la Russie mais bien plutôt les puissances émergentes qui veulent prendre leur revanche sur l’Europe et le monde occidental qui les ont dominées pendant plusieurs siècles. Les Américains seraient donc bien avisés de comprendre ce grand basculement et d’en tirer les conséquences : pour faire face à ces nouvelles puissances comme la Chine et dont beaucoup sont animées par le ressentiment ou l’esprit de vengeance, les États-Unis gagneraient à avoir à leur coté une vraie puissance européenne autonome et une Russie forte qui reste européenne.

L’Union européenne devrait se désolidariser des États- Unis pour imposer la désescalade

D’ici là, et pour en revenir à la guerre en Ukraine et au risque majeur d’une escalade nucléaire, je considère qu’il est de la responsabilité historique de l’Union européenne de se désolidariser officiellement des États-Unis et, forte de cette nouvelle légitimité, de se positionner avec autorité comme une puissance d’apaisement et de désescalade, écartant les Américains et poussant les deux parties à la négociation. Telle est l’initiative que devrait prendre rapidement l’actuel président de l’Union européenne, Emmanuel Macron. Et peu importe si certains pays comme la Pologne s’opposent à une telle prise de position, l’enjeu est trop important pour ne pas passer outre. Il s’agit en effet d’éviter le risque d’une guerre qui d’ailleurs ne serait pas mondiale. Car cette guerre n’embraserait que l’Europe et l’Amérique du nord. Elle conduirait au suicide du monde européen et chrétien, ce serait le crépuscule de l’Occident.

Par Bruno Mégret, ancien président du MNR le 2 mai 2022

vendredi 29 avril 2022

Victoire de Macron : les 10 commandements des médias, par Jean-Yves Le Gallou

 


1- Le duel Macron-Le Pen tu installeras

Dès le printemps 2021, le scénario de l’élection présidentielle de 2022 a été mis en place. Sur fond de gauche explosée et de LR divisé, les premiers sondages ont annoncé un duel Macron/Le Pen pour le second tour. Or les sondages ne sont pas des simples photographies, ce sont aussi des prophéties auto réalisatrices : si deux postulants sortent en tête on en parle, et en parlant on les conforte dans leur position dominante, et ainsi de suite. C’est le cercle vertueux de la notoriété. Et au cas particulier le schéma idéal pour la réélection de Macron… .

2- Les limites du politiquement correct tu imposeras

En principe les débats sont libres en France. En réalité il est seulement permis de débattre tranquillement à l’intérieur du cercle des convenances politiquement correctes. Si vous êtes pour la « transition énergétique », le progressisme sociétal, l’ouverture des frontières et le « vivre ensemble », tout ira bien pour vous : vous obtiendrez facilement la parole et vous serez interrogés courtoisement. Mais attention ! Toute tentation transgressive vous voudra invisibilisation ou diabolisation. Toute prise de parole dissidente ne pourra se faire que sur un fond d’hostilité dans le but de vous faire passer pour agressif. Avec le risque permanent d’être accusé de « dérapage ». Comme l’exprime François Bousquet : « Le vrai pouvoir, c’est la production de la parole autorisée. Il n’y en a pas d’autre. Cela s’appelle la fenêtre d’Overton. »

3- Du Covid tu parleras un peu, beaucoup, passionnément…

2000 morts (le nombre de décès journaliers en hiver), c’est de la statistique ! Mais cent morts dû au ou avec le Covid, cela émeut à coup de déclarations ministérielles, de Une du JT de 20 heures et de bandeau défilant sur les chaines en continu. Une vraie technique d’ahurissement monopolisant les conversations, soudant derrière le « chef de guerre » et marginalisant tout vrai discours politique. Avec la complicité des médias l’exécutif a calé les mesures sanitaires sur ses intérêts électoraux, en sidérant et en enfermant d’abord, en libérant ensuite à deux mois de l’échéance électorale.

 4- Zemmour tu diaboliseras

A l’automne, Eric Zemmour est entré dans ce dispositif comme un chien dans un jeu de quilles. Avec la ferme volonté d’inviter dans la campagne les thèmes de la survie de la France et des mesures à prendre face au Grand Remplacement et au Grand Déclassement. Après une entrée en fanfare et en seulement quelques semaines les médias sont passés du léchage au lâchage puis au lynchage. A chaque fois qu’il approchait les 15% dans les sondages, Zemmour était victime d’un intense bombardement médiatique : en octobre/ novembre pour sa prétendue misogynie et son pétainisme supposé, en janvier pour une cabale autour du handicap, fin février pour un procès en poutinophilie et en inhumanité.

5- Marine Le Pen tu ménageras (provisoirement…)

La présence de Zemmour a servi à Marine Le Pen de paratonnerre : puisqu’il y avait plus méchant qu’elle on pouvait expliquer qu’elle avait changé, de style, d’idées, de comportement (y compris en « Une » de VSD) et lui permettre de faire campagne tranquillement pendant que les milices violentes d’extrême gauche s’acharnaient sur Zemmour, sous l’œil attentif de la caste journalistique.

6- Le thème du pouvoir d’achat tu imposeras

Très vite, il est apparu nécessaire d’évacuer les thèmes civilisationnels et identitaires de même que celui du Grand Déclassement (industriel, éducatif, stratégique) : trop dangereux, pire trop politique. Et c’est ainsi qu’avec l’aide des sondeurs, le thème du pouvoir d’achat a été imposé dans la campagne. Facile pour le pouvoir d’achat de sortir en tête des préoccupations des Français : ce n’est pas clivant (cela ne mange pas de pain, si l’on peut dire…) et cela concerne tout le monde, depuis le gilet jaune qui doit renoncer à un plein d’essence jusqu’au communicant qui doit se priver de sa deuxième Rolex. C’est ainsi qu’à partir de janvier tous les débats électoraux tournent autour de cette question : les trois M – Macron, Mélenchon et Marine – sortant le chéquier plus vite que leur ombre. Sans que jamais un journaliste ( ?) ne s’avise de poser la question suivante : « comment financez-vous cela ? » Alors que quiconque s’aventure à parler de protectionnisme, de contrôle de l’immigration ou de vraies mesures sécuritaires se heurte à une rafale d’objections.

7- Macron tu ne questionneras pas

Après 5 ans de pouvoir les Français étaient en droit d’attendre un débat sur le bilan d’Emmanuel Macron. Mais le candidat sortant a choisi une stratégie d’évitement en utilisant le Covid jusqu’à mi-février puis la guerre russo-ukrainienne lorsqu’elle survint. Les médias se sont prêtés à ce sujet en étant monothématiques, sinon obsessionnels. Et en se gardant d’aborder les sujets qui fâchent : la dette, le déficit commercial astronomique, les scandales (Mac Kinsey, Alstom, etc.), l’insécurité, l’immigration hors de contrôle. Et le moins qu’on puisse dire c’est que lors des rares fois où Macron fut face à des journalistes ceux-ci se gardèrent bien d’être incisifs.

8- Macron tu protègeras

Les médias sont même allés plus loin. Ils ont considéré toute attaque un peu vive de Macron comme un « dérapage ». A l’issue de son meeting de Villepinte (novembre), Éric Zemmour fut accusé « d’attaques d’une rare violence » ‪pour avoir qualifié, Macron de « mannequin de plastique », de « masque sans visage », d’ »automate dans un labyrinthe sans fin » et d’ »adolescent qui se cherche » ». Et le succès de son rassemblement au Trocadéro (mars) fut médiatiquement occulté par quelques cris de « Macron assassin » lancés par des militants (légitimement) indignés par sa politique sécuritaire.

9- La guerre d’Ukraine tu exploiteras

Le 24 février, la Russie envahit l’Ukraine et l’épidémie de Covid disparaît des écrans. La guerre russo-ukrainienne porte le « chef de guerre » Macron au pinacle et place la campagne entre parenthèses. On n’en parle plus et quand un candidat est invité dans un média c’est pour être interrogé sur l’Ukraine sachant qu’une seule position est permise: la reprise du point de vue de l’OTAN et des éléments de langage du gouvernement ukrainien. A ce petit jeu le maintien d’un peu de dignité gaulliste coûtera cher à Éric Zemmour qui décrochera dans les sondages avant d’être frappé par le « vote utile ». Bien sûr, la guerre est un grand malheur mais pas pour ses grands profiteurs, y compris électoraux.

10- Marine Le Pen tu rediaboliseras

Si l’on pouvait encore nourrir un doute sur l’existence d’une véritable stratégie de campagne de la part des médias, ce qui s’est passé pour le second tour le dissiperait. Avant le 10 avril Marine Le Pen est une «  candidate qui a changé », « sensible aux préoccupations des Français et à la question de leur pouvoir d’achat », «  qui mène une belle campagne » et pour laquelle somme toute on peut voter. Tout change au soir du 10 avril. La diabolisation revient : au petit trot d’abord, au galop ensuite. La seule nouveauté c’est que l’élément diabolisateur n’est pas Pétain mais Poutine, le «  nouvel Hitler », il est vrai. Oubliés avant le premier tour le prêt russe accordé au Rassemblement national et la poignée de main de la candidate avec le président russe sont à la une. Dès lors rien n’est épargné à la «  candidate d’extrême droite » dont les propositions sont désormais disséquées. Lors du débat du 20 avril des armées de «  fact checkers » traquent la moindre imprécision de Marine Le Pen tandis que les gros bobards (sur les travailleurs frontaliers par exemple) et les gros nanards du président sortant passent chrême. Les médias sont univoques. Au fait comment appelle-t-on un pays où lors d’une élection TOUS les journaux donnent la même consigne de vote?

Conclusion : post démocratie et société de propagande

Bien sûr cette description sombre de la pensée unique médiatique n’exclut pas de petits coins de ciel bleu : des journalistes s’efforçant à un minimum d’objectivité et des débats parfois ouverts sur certaines chaînes d’info en continu. Mais pour une élection présidentielle à forte participation électorale l’essentiel se joue ailleurs : sur les grands médias, les médias de grand chemin, TF1, France2, France3, M6, dont l’ensemble des JT touchent 16 millions de spectateurs. Des spectateurs-électeurs par ailleurs conditionnés par des publicités, des feuilletons et des séries d’inspiration progressiste, sinon wokiste…

Nous vivons en post-démocratie, dans une société de propagande où l’appareil de contrôle sur les esprits n’a jamais été aussi puissant. On peut douter dans ces conditions de la possibilité d’un quelconque réel changement par les urnes tant il y a une maîtrise du calendrier et des sujets de l’élection, par les grands médias et les organes de communication. Comme l’a exprimé, le 2 avril 2022, l’hespérialiste David Engels au IXe colloque de l’Institut Iliade : « Ne nous trompons pas : ce n’est pas par le biais de processus démocratiques conventionnels que nous obtiendrons la victoire […] parce que l’ensemble du système politique actuel, malgré le pluralisme formel, est si unilatéralement dominé par le libéral-gauchisme qu’il rend une victoire électorale globale de la “droite” impossible dans les faits et ne peut donc être qualifié de démocratique que dans une mesure limitée. Qu’il s’agisse de l’orientation gauchiste des médias, de l’école, de l’université, du monde professionnel, des institutions de l’État ou des fonctions politiques : partout, la synchronisation idéologique est telle que seules des infimes nuances de gauchisme semblent être tolérées, tandis que tout mouvement patriotique culturel est soit étouffé, soit désintégré de l’intérieur, soit discrédité ou éradiqué. »

Par Jean-Yves LeGallou le 24 avril 2022