mercredi 11 janvier 2023

LR : la déroute des retraites !

 


« Cette réforme doit être efficace et juste. » Lorsque Éric Woerth prend le micro pour interpeller le ministre du Travail Olivier Dussopt lors des questions au gouvernement, on entend tousser dans les rangs de . Car l’ancien ministre de Nicolas Sarkozy passé chez Renaissance, auteur d’une loi réformant les retraites en 2010, synthétise en « chaire » et en os la corde raide sur laquelle dansent les députés « de la droite et du centre » dont l’appellation est en soi une main tendue vers la Macronie. « Le macroniste Woerth, ancien ministre de Sarkozy, interroge le macroniste Dussopt, ancien député socialiste, sur la . Le macronisme, agrégation des renégats des deux camps, au service d’un opportunisme qui emporte tout sur son passage », tweetait, rageur, le député NUPES Benjamin Lucas. Ce dernier n’est pas un habitué de la finesse analytique, mais cette sortie, quoique partiale, résume à sa façon le malaise qui agite la sphère LR, condamnée à reculer devant une réforme qu’elle aurait menée si elle avait été aux affaires. Et le malaise, c’est que cela se sait...

Opposants ou béquille du pouvoir ?

C’est l’éternelle question. En élisant à la présidence du groupe  Olivier Marleix, en opposition frontale avec , les députés Républicains revenaient essorés, amoindris, écrasés entre une galaxie macroniste en majorité relative et un groupe  en surnombre et, enfin, étouffés par une NUPES vociférante. Néanmoins, ils revenaient avec un message clair : ils étaient dans l’opposition. Après plusieurs mois chaotiques, l’élection d’Éric Ciotti devait apporter un surcroît de clarification. Et puis arriva la réforme des retraites. Ils se trouvèrent déchirés entre le troisième homme de l’élection, Aurélien Pradié, qui manifestait sa volonté de voter contre la réforme, et la vision de Bruno Retailleau, qui affirmait, dans Le Figaro, que la  était « un enjeu essentiel pour le pays mais c’est aussi une épreuve de vérité pour la droite […]. Allons-nous défendre ce que nous avons toujours défendu ? Ou bien allons-nous glisser dans les sables mouvants du reniement ? » Dans la pure continuité de la ligne du candidat Fillon en 2017, Bruno Retailleau plaide pour une retraite à 65 ans.

Chez LR, trois tendances distinctes

Puis est arrivé la synthèse d’Éric Ciotti : celui qui fut pendant des années le tenant de la ligne droite dure au sein des  façon « Droite forte » sauce Peltier-Didier du temps de la présidence Copé joue aujourd’hui le jeu de l’équilibriste et du compromis. Aussi, le groupe plaide pour une réforme progressive et un départ à 63 ans en 2027. Il y a donc ceux qui ne veulent pas de recul du tout, ceux qui veulent la retraite à 65 ans et ceux qui veulent un compromis à 63 ans, jugeant cela moins brutal. Un compromis ou une compromission ? « Éric Ciotti joue l’opposant après avoir appelé à voter pour Renaud Muselier (président de PACA, ex- passé chez Macron) aux régionales contre nous », s’amuse, auprès de BV, un député « L’explication de leurs résultats catastrophiques, c’est l’absence de ligne claire. Ils sont inaudibles sur les sujets majeurs », soupire le sénateur ex- du Val-d’Oise Sébastien Meurant, qui a rallié Éric Zemmour pendant la campagne présidentielle.

Un flou qui profite au 

L’avantage de l’opposition franche et frontale est qu’elle vous épargne ce genre de calculs. « Prêts à voter une motion de censure déposée par LR si ceux-ci retrouvent leur courage en route », affirme le président du RN. Dans les très chics Salons Hoche, à quelques pas de la place de l’Étoile, Jordan Bardella présentait avec les parlementaires ses vœux à la presse.

« Lorsqu’on ne vote aucune motion de censure, on est l’UDI d’Emmanuel Macron », nous glisse Jordan Bardella, en aparté. Celui qui a succédé à Marine Le Pen à la tête du Rassemblement national ne manque pas d’étriller les députés de droite. « Soit ils restent la béquille d’Emmanuel Macron, soit ils décident en toute transparence de rejoindre la majorité d’Emmanuel Macron. »

Comme souvent, le compromis devait se trouver entre les deux. Et c’est, mesurons le poids du symbole, le Premier ministre Élisabeth Borne qui aura arbitré le débat interne des LR. La chef du gouvernement a annoncé une retraite à 64 ans de 43 annuités et 67 ans pour le taux plein. Avec, en prime, la revalorisation des petites retraites et celles des mères de « La réforme proposée par Élisabeth Borne reprend celle que nous votons au Sénat »se réjouit Bruno Retailleau.

Et l’épilogue vaudevillesque LR-Renaissance a de quoi faire sourire. Le gouvernement peut proposer une réforme « de consensus » et les LR peuvent s’en attribuer le mérite. Reste à savoir qui est l’assurance-vie de qui et surtout, pour paraphraser Jordan Bardella, qui est la béquille de qui. Le groupe d’opposition voulu par Olivier Marleix doit son unité à la chef du gouvernement qu’ils sont censés combattre. Les futures motions de censure ne passeront pas et les Républicains peuvent souffler, la dissolution n’est pas pour demain.

Par Marc Eynaud le 10 janvier 2023

Boulevard Voltaire

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