mercredi 13 mars 2024

Le curieux et soudain bellicisme d’Emmanuel Macron



Emmanuel Macron brûle d’affronter Vladimir Poutine les armes à la main – ou du moins s’attache-t-il à en donner l’impression. Mais pourquoi alors ne montre-t-il pas une telle ardeur dans d’autres cas, qui pourtant le justifieraient au moins autant, et pour certains nettement plus ?

À entendre le chef de l’Etat, quiconque ne partage pas cette ferveur est animé par « l’esprit de défaite »… y compris la Maison Blanche, dont un porte-parole, le contre-amiral John Kirby, s’est empressé de désavouer notre président ? Y compris le ministre de la Défense, qui a expliqué qu’il n’était « pas question d’envoyer des troupes combattantes » le lendemain du jour où le président, lui, affirmait qu’il n’y avait « aucune limite » à notre soutien à l’Ukraine ? Qu’importe la confusion entretenue, Emmanuel Macron dit vouloir « bousculer » les alliés de l’Ukraine, appelle les Européens à « ne pas être lâches », et quand on lui demande si ce propos vise l’Allemagne il répond sans hésiter : « pas seulement l’Allemagne, tout le monde ! » Et à en croire nombre de macronistes, toute personne réticente devant ce soudain bellicisme est pire que lâche, elle fait partie des « troupes de Poutine ». Qu’on se le dise : oser douter des décisions du président, c’est forcément être coupable d’intelligence avec l’ennemi !

On verra qui est pour Zelensky et qui est pour Poutine… 

On pourrait croire à une stratégie « gentil flic, méchant flic », Emmanuel Macron jouant le rôle d’un va-t-en-guerre forcené pour permettre à Olaf Scholz de négocier en coulisses en disant à Poutine : « Vladimir, il faut vraiment que tu retires tes troupes d’Ukraine, sinon je ne vais plus pouvoir retenir ce fou de Français et il va déclencher la Troisième Guerre mondiale ». Mais la France à elle seule ne serait pas une menace suffisante aux yeux de la Russie pour que cela fonctionne.

Alors on prend l’excitation martiale du président au premier degré, et on tombe dans le piège qu’il a lui-même avoué : « on verra qui est pour Zelensky et qui est pour Poutine », comme si cette ligne de démarcation caricaturale était l’alpha et l’omega de toute chose. Et on oublie l’essentiel.

Cet essentiel, le voici : le plus important n’est pas le bellicisme d’Emmanuel Macron face à la Russie, mais le contraste entre ce bellicisme et sa pusillanimité face aux Comores, au Qatar, à la Turquie, à l’Algérie, à l’Arabie Saoudite, à l’Iran. Ce contraste interroge.

Ce sont là des pays qui ne respectent pas les Droits de l’Homme plus que ne les respecte le régime de Poutine – ils les respectent même généralement moins. Et si la mort d’Alexeï Navalny est une ligne rouge, on ne voit pas pourquoi celle de Jamal Khashoggi n’en serait pas une également.

Ce sont des pays qui piétinent volontiers le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et multiplient les exactions, au Kurdistan comme au Yémen, sans même parler du fait que le Qatar finance, protège et héberge toujours le Hamas malgré le pogrom/razzia du 7 octobre.

Les drôles d’exigences de la realpolitik

Et ce sont des pays qui nous agressent bien plus que ne le fait la Russie, par la violence, la déstabilisation, la corruption, l’influence toxique. Les Comores – avec d’ailleurs le soutien affiché de la Russie – organisent l’invasion et la mise à sac de Mayotte, c’est-à-dire du territoire français. Le Qatar use de son influence pour déstabiliser le pays (que l’on se souvienne de la propagande d’AJ+ lors des émeutes du début de l’été 2023), répandre la corruption (pas seulement au Parlement Européen), soutenir l’islamisme, attiser les flammes de la haine anti-israélienne et de l’antisémitisme, et appuyer les Frères Musulmans dans leur entrisme systémique au sein de nos institutions. L’Algérie cultive la haine anti-France dans sa population et sa diaspora, dont le poids dans la délinquance sur notre sol est démesuré. L’Arabie Saoudite et sa Ligue Islamique Mondiale veulent interdire toute critique sérieuse de l’islam en œuvrant à l’instauration planétaire d’un délit de blasphème. On pourrait poursuivre longuement l’énumération, qui n’a rigoureusement rien à envier à la liste des torts de Vladimir Poutine.

Bien sûr, les fautes du Qatar n’effacent pas celles de la Russie, mais la réciproque est vraie, les fautes de la Russie n’effacent pas celles du Qatar. Bien sûr, la Russie nous est désormais hostile, et débattre à l’infini des responsabilités des uns et des autres dans cette hostilité ne changera pas la situation présente, mais les Comores et l’Algérie le sont au moins autant. Bien sûr, la realpolitik a ses exigences, encore faut-il que ses défenseurs aient la décence de l’assumer au lieu de se draper dans des postures morales hypocrites : on peut considérer que l’appui de l’aviation qatarie au désengagement de Barkhane ou notre présence sur la base d’Al-Udeid justifient que nous acceptions la contribution du Qatar aux réseaux islamistes qui attisent partout en Europe l’avidité des fous d’Allah et la haine antisémite, mais il me semble que l’on aurait aussi d’excellentes raisons d’estimer que le prix à payer pour « l’amitié » de l’émirat est bien trop élevé ! Bien sûr aussi, il faut choisir ses combats, la France ne peut pas voler au secours de tous les peuples envahis ni combattre tous les tyrans de la planète, et l’Ukraine est pour ainsi dire notre voisin. Mais il y a une différence de taille entre ne pas combattre un tyran, et le courtiser en encourageant sa propagande. Il y en a une autre, énorme, entre ne pas intervenir partout pour privilégier notre voisinage proche, et préférer défendre l’Ukraine plutôt que la France elle-même, vouloir sauver Kiev des troupes russes tout en abandonnant Mamoudzou aux bandes comoriennes. Et laisser le champ libre à AJ+ quand on interdit RT France est une incohérence qui en dit long.

Si les raisons invoquées par Emmanuel Macron pour expliquer son attitude contre la Russie étaient vraies, s’il s’agissait bel et bien de défendre les principes qu’il dit professer, l’Europe et les intérêts vitaux de la France, alors a fortiori il se montrerait déterminé et martial contre les Comores pour protéger notre territoire et nos concitoyens à Mayotte. Il ne ferait pas de courbettes au Qatar, et ne lui vendrait pas des éléments stratégiques de notre économie. Il ne tolérerait pas la servilité de l’ONU envers la dictature abjecte des mollahs.

Voilà ce dont devrait se préoccuper toute la classe politique, et plus encore ceux qui pensent qu’il serait bon d’intensifier notre soutien à Kiev, y compris par un engagement militaire : de toute évidence, les motivations d’Emmanuel Macron dans cette affaire ne sont pas celles qu’il déclare. Quelles sont-elles ? Je ne peux que hasarder diverses hypothèses : une diversion après son fiasco au Salon de l’agriculture ; une manœuvre pour essayer de rediaboliser le RN à l’approche des élections européennes ; un prétexte pour transférer toujours plus de pouvoir aux institutions non-élues de l’UE au détriment de la démocratie, et sans doute renforcer le contrôle de l’information ; l’appétit pour les opportunités qu’une « économie de guerre » offrirait à Bercy ; une tentative de se donner une stature de meneur au sein de la dynamique otanienne….

Dans tous les cas, l’essentiel demeure : même si l’on croit que notre participation à la guerre en Ukraine est juste et nécessaire, pouvons-nous réellement l’envisager avec un chef des armées dont nous ignorons les véritables objectifs ? Il faudrait au minimum des garanties extrêmement solides, mais comment accorder la moindre confiance aux garanties que donnerait Emmanuel Macron, alors qu’il n’a eu aucun scrupule à escroquer jusqu’au Sénat au sujet de la Loi immigration, saisissant lui-même le Conseil Constitutionnel pour faire censurer tout ce que son gouvernement avait fait mine de concéder à la représentation nationale ?

Telle est la question que personne ne pose, alors qu’elle est celle dont nous devrions tous débattre.

Par Aurélien Marq le 12 mars 2024

Causeur

mardi 12 mars 2024

Nicolas Vidal (Putsh Média) sur Radio Courtoisie le 12 mars 2024

Ivan Rioufol sur Radio Courtoisie le 12 mars 2024

Lancement de la campagne des européennes avec Marine Le Pen et Jordan Bardella le 3 mars 2024

Nicolas Dupont-Aignan (DLF) sur Tocsin le 12 mars 2024

 

Chega : le RN portugais s’impose et bouscule le paysage politique



Pas de champagne chez les élus du Rassemblement National pour la victoire du parti patriote portugais Chega, ce dimanche 10 mars, mais des messages triomphants : « Les Portugais défendent leur identité et leur prospérité et balayent les socialistes corrompus », lance Jordan Bardella, sur X, ce 11 mars. « En deux ans, Chega est passé de 7 % à près de 20 %, incarnant aujourd’hui la force politique d’avenir au Portugal, applaudit Marine Le Pen. Bravo à notre ami André Ventura pour ce beau résultat. Nous vous attendons avec impatience le 9 juin pour bâtir ensemble l’Alliance européenne des nations. »

Une joie qui n’atteint pas Clément Beaune, lequel vomit sa haine sur le même réseau X, ni Manon Aubry, de La France insoumise. Pour elle, le scrutin de dimanche ressemble à une demolition party au palais des mythes de la gauche. « Cinquante ans après la révolution des œillets, c’est un triste jour pour le Portugal qui voit une percée du parti d’extrême droite Chega qui quadruple ses sièges. »

Chega (Assez ou Ça suffit, en portugais), le parti d’André Ventura, 41 ans, et de Pedro Pinto, la tête de liste qui a salué « une nuit historique », s’impose en troisième position dans le scrutin, avec 18 % des voix, derrière le parti de centre droit Alliance démocratique et derrière le parti socialiste de Pedro Nuno Santos, au pouvoir depuis 2015. Une poussée irrésistible.

Personnalité charismatique

Fondé en 2019, voilà donc moins de cinq ans, Chega avait alors obtenu 1,3 % des voix. Deux ans plus tard, en 2021, il termine troisième à l’élection présidentielle avec 11,9 % des suffrages et s’impose parmi les partis de gouvernement. En frôlant la barre des 20 %, Chega va quadrupler le nombre de ses élus au Parlement : Ventura et Pinto disposent aujourd’hui de douze sièges au sein d’une assemblée qui en compte 230, ils mèneront désormais 48 députés.

Ancien inspecteur des impôts, diplômé en droit, André Ventura n’est pas né sous les dorures des palais mais dans un milieu de petite bourgeoisie de Lisbonne. Journaliste au sein du Figaro portugais (Correio da Manhã), le journal le plus lu, cette personnalité charismatique a aussi exercé ses talents comme journaliste sportif avant de s’engager au sein du parti social-démocrate de centre droit qu'il a quitté pour mener ce raid. Mais ce succès ne mènera pas Chega au pouvoir immédiatement : le parti a trouvé porte close chez les conservateurs, qui refusent pour l'instant toute alliance. La composition du futur gouvernement qui dépend d'alliances n'est pas encore connue.

La performance de Chega n’a rien d’une surprise, ni au Portugal, ni en France où le RN l’attendait comme un nouveau signe de la montée des partis patriotes en Europe. Et pour cause : les Portugais de Chega sont très proches du parti de Marine Le Pen. « Ils sont, comme nous, favorables à une Europe des nations, explique le chef de la délégation française RN au Parlement européen Jean-Paul Garraud, qui a fait l’an dernier le voyage au Portugal avec Jordan Bardella pour participer au congrès du parti. André Ventura a depuis longtemps pour modèle Marine Le Pen, poursuit Jean-Paul Garraud. Ils sont très proches de nous, y compris à titre personnel. Les cadres et les électeurs de Chega voient ce qui se passe chez nous : ils n’ont pas envie que cela arrive chez eux. »

Pouvoir d'achat, corruption...

La diaspora la plus nombreuse de ce pays de dix millions d’habitants habite en France et le français est, au pays de Magellan, la deuxième langue parlée. Les Portugais ont les yeux tournés vers la France. « Ils vivent en France ce que vivent les Français et en parlent lorsqu’ils reviennent dans leur pays », explique Johanna Maurel, conseillère régionale RN et déléguée des Français de l’étranger pour le Portugal et l’Espagne notamment. À ce « modèle français » devenu un anti-modèle tout autour du monde s’ajoutent les résultats d’une gestion socialiste dramatique sur une population aux revenus faibles : le SMIC portugais n’atteint pas la barre des 650 euros. Durant sa campagne, Chega a privilégié les thèmes du pouvoir d’achat, de la corruption du PS au pouvoir, de la fiscalité trop lourde, de l’état du système de santé ou de l’immigration.

À trois mois des élections européennes, le scrutin ne peut mieux tomber pour tous les partis patriotes et anti-européens à la manière de von der Leyen du Vieux Continent. 

Reste à franchir le cap pour atteindre le pouvoir effectif, un vrai défi qui se double d’un autre, celui de l’unité de ces partis patriotes émergents ou plus anciens, demain, à Strasbourg, contre les élus du centre droit et du centre gauche. En attendant, la vague de dégagisme qui touche les européistes de tous les pays d'Europe promet quelques soirées électorales stressantes pour ceux qui ont choisi d’écraser les nations.

Par Marc Baudriller le 11 mars 2024

Boulevard Voltaire

samedi 9 mars 2024

F. Roussel aime bien le symbole de la faucille et du marteau : on en parle ?



Fabien Roussel s’est rendu au Salon de l’agriculture, comme tout le monde. C’est un passage obligé de la communication politique. Il est de bon ton, dans certains cénacles de droite, de le considérer sympathique parce qu’il affirme apprécier le bon vin, la gastronomie et le bœuf. Ce qui fait s’étrangler de rage ou d’indignation certains écologistes, mais qui est un peu court pour délivrer un brevet de bienséance politique au patron du Parti communiste français.

La déambulation du chef des camarades a été suivie par les médias. Apparemment tout content de sa trouvaille, il a souvent rappelé que « notre symbole, c’est la faucille et le marteau » (CLPRESS 29/2/2024), en insistant sur le premier outil pour indiquer la proximité naturelle du parti pour la paysannerie. Il avait même déclaré au Figaro, en janvier : « Nous avons toujours défendu les travailleurs de la faucille et du marteau. »

Il semble nécessaire de rappeler à M. Roussel quel fut le sort réservé aux paysans par le système communiste lorsqu’il détenait le pouvoir. Le délicieux Lénine n’avait-il pas considéré la terrible famine de 1921-1922, qui causa environ cinq millions de morts, « socialement utile » car elle faisait disparaître la paysannerie. Avec le cynisme qui lui était propre, il en profita pour exterminer le clergé orthodoxe : « Avec tous ces gens affamés qui se nourrissent de chair humaine, avec les routes jonchées de centaines de milliers de cadavres, c’est maintenant et seulement maintenant que nous pouvons (et par conséquent devons) confisquer les biens de l’Église avec une énergie farouche, impitoyable. » Et d’ajouter, dans une lettre à Trotski : « Plus nous fusillerons de clercs, mieux ce sera » (lettre du 19 mars 1922). Alors même que l’Église orthodoxe venait en aide de façon massive aux affamés.

Une décennie plus tard, son successeur et fidèle héritier, Staline, organisa la « dékoulakisation », c'est-à-dire l’extermination des petits paysans propriétaires d’Ukraine, de Biélorussie et du centre de la Russie, du Don, de la Volga, du Kouban, du sud de l’Oural, du Kazakhstan et de la Sibérie occidentale par une famine orchestrée par les communistes à l’occasion de la collectivisation des terres. Cet « Holodomor » (extermination par la faim) fit entre cinq et huit millions de morts et peut être rapproché de la Shoah en nombre de victimes.

Ce si bel exemple fut suivi par Mao, grand héros communiste lui aussi, avec le « grand bond en avant », politique de collectivisation des terres dans les années 60 qui causa 50 millions de morts, des Khmers rouges (1975-1979), deux millions de morts, ou de la Corée du Nord, avec la famille Kim dans les années 1990, où la famine causa entre un et trois millions de morts. Les références « agricoles » du communisme sont en effet exemplaires.

M. Roussel aime bien le symbole de la faucille et du marteau. Or, ce symbole est dégoulinant du sang de plus de 100 millions de victimes depuis 1917. Il est le symbole de la nuit totalitaire qui s’est abattue sur des dizaines de millions d’êtres humains pendant des décennies et les a privé des libertés les plus fondamentales : liberté religieuse, liberté de pensée, liberté d’expression, liberté politique, liberté d’entreprendre, liberté d’éduquer ses enfants… Symbole d’un système qui se voulait une science économique et a plongé les peuples dans la ruine matérielle et morale.

Le PCF n’étant plus grand-chose dans le paysage politique français, personne n’a prêté grande attention à la venue de Fabien Roussel au Salon de l’agriculture, mais cette bonne conscience communiste a quelque chose de proprement écœurant. Tout comme le fait que, de la droite à la gauche, tout le monde semble considérer que les communistes français font partie de « l’arc républicain » alors même que les régimes communistes, dont ils furent les alliés, ont été parmi les régimes les plus criminels de notre époque ! Et le sont encore en Chine, en Corée, au Vietnam, au Laos ou à Cuba.

L’explication tient en partie à l’entrée en résistance des communistes quand l’Union soviétique fut attaquée par Hitler. Mais plus profondément, la Révolution française est le mythe fondateur de la République et, en même temps, la mère des révolutions. Lénine y faisait souvent référence. Condamner les révolutions marxistes-léninistes, c’est, d’une certaine façon, condamner notre Révolution qui ne fut pas avare de massacres et d’exterminations. 

Un tabou impensable !

Par Stéphane Buffetaut le 9 mars 2024

Boulevard Voltaire

Russie / Ukraine : La propagande des va-t’en guerre - Pierre Conesa sur TV Libertés le 9 mars 2024